Ombres et brouillard

de Woody Allen |
avec Woody Allen, Mia Farrow, John Malkovitch, Madonna, Jodie Foster, Kathy Bates, Lily Tomlin, Anne Lange, John Cusak, Kate Nelligan, Donald Pleasance, Julie Kavner, Eszter Balint, etc.


Dans un univers en noir et blanc qui ressemble au Berlin des années trente, Kleinmann est, à la manière du Joseph K. du Procès de Kafka, plongé dans un système dont le sens lui échappe. En pleine nuit, il est happé par une obscure milice à la recherche d’un néo-«M le maudit». Innocent, il se retrouve suspect, voire coupable. De quoi, au juste? D’être ce qu’il est, un homme normal, lâche, comme il le dit lui même: «je n’en sais pas assez pour être incompétent». Hommage au cinéma expressionniste allemand, à «La Nuit des forains» de Bergman ou à «Freaks» de Todd Browning, «Ombres et brouillard» est à lire (aussi) en référence au «Nacht und Nebel» (Nuit et brouillard) de la «solution finale» nazie — même si le mot «juif» n’est jamais prononcé. Film sur le cinéma et l’Histoire, la mémoire et l’oubli, sur un mal ancestral (la peur du vide et la haine de l’autre), «Ombres et brouillard» est un cauchemar éveillé où seul l’amour, le sexe et l’illusion (via les prostituées et les gens du cirque) offrent une voie de salut; un film sans illusion d’où émerge, à la fin, l’espoir que l’imaginaire — le rêve — puisse un jour tout changer.
SHADOWS AND FOG, Etats-Unis, 1991, noir et blanc, 1h26; programme n°50