Ne te retourne pas

A voir samedi 2 mars 2013 à 22h15 sur RTS Un |

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Pari cinématographique audacieux, le second long-métrage de la réalisatrice Marina de Van décrit les avanies d’une mère de famille en proie à un transfert d’identité. Si le résultat n’est pas complètement abouti, il n’en reste pas moins fascinant dans son jeu de rôles qui met aux prises deux actrices «people» du cinéma français.

Consubstantiel au théâtre et au cinéma, le thème du transfert d’identité semble être une affaire des grands cinéastes. Chef-d’œuvre du genre, «Persona» (1966) du Suédois Ingmar Bergman «confondait» insidieusement Liv Hullmann et Bibi Andersson, au point que le spectateur ne parvenait plus à les différencier. Sur un mode plus espiègle, le surréaliste Buñuel alternait dans «L’Obscur Objet du désir» (1977) les très dissemblables Angela Molina et Carole Bouquet dans le même rôle, raillant sous cape notre désir de vraisemblance.

Ancienne scénariste de François Ozon, Marina de Van propose avec «Ne te retourne pas» une variation de ce jeu vertigineux. Après «Dans ma peau» (2002), un premier long-métrage provocateur traitant de l’automutilation, dans lequel elle jouait le personnage principal, la jeune réalisatrice effectue une incursion dans le fantastique psychologique, dont on sait qu’il est le produit de subtils et progressifs glissements du réel.

Mère de deux charmants bambins, marié à un gentil mari, Jeanne (Sophie Marceau) est une écrivaine en butte à son premier roman. Anxieuse, elle est le siège d’étranges phénomènes. Ainsi, dans la rue, elle croise une fillette inconnue qui lui semble pourtant familière. Plus tard, la malheureuse ne reconnaît plus son appartement. Au paroxysme de la crise, elle prend son mari et ses enfants pour de parfaits étrangers. De fait, Jeanne devient peu à peu une autre Jeanne (jouée par Monica Bellucci)…

Impavide, la cinéaste prend alors des risques passionnants, faisant par exemple jouer faux l’entourage de sa protagoniste pour obtenir un décalage troublant. Idem dans sa manière de réunir deux actrices à l’aura «people» très distincts, de la séduction lisse et rassurante de l’une à la sensualité affichée de l’autre. L’on regrettera cependant que De Van coupe court à ce tour de force en multipliant en fin de film moult justifications explicatives… Un accès de faiblesse qui lui aura sans doute coûté sa place au palmarès du Festival de Cannes en 2009!

de Marina De Van
France, 2007, 1h51