Louise-Michel

Sundance 09, Prix spécial du Jury
de Benoît Delépine et Gustave Kervern
avec Yolande Moreau, Bouli Lanners, Benoît Poelvoorde, Albert Dupontel, Mathieu Kassovitz, etc.


Les deux activistes formés chez Groland ne desserrent pas le moins du monde leur étreinte bête et méchante. Après les paraplégiques teigneux de «Aaltra» (2004) et le «canicide» savoureux de «Avida» (2006), Benoît Delépine et Gustave Kervern récidivent avec «Louise-Michel», une comédie noire dont le titre fait ironiquement référence à l’égérie anarchiste de la Commune de Paris… Bernés par la direction qui a démantelé l’usine durant la nuit, les ouvriers licenciés d’une entreprise de textiles picarde se retrouvent au bistrot pour discuter de leur pauvre avenir commun. Emplie d’une rage décuplée par un quotient intellectuel plus bas que la moyenne, Louise (Yolande Moreau) propose de rassembler leurs maigres indemnités de licenciement pour engager un tueur à gages et lui confier le mandat de liquider le patron indélicat. Ses collègues plébiscitent cette sortie de crise originale et chargent Louise de prendre contact avec un sicaire. L’ouvrière vengeresse embauche alors Michel (Bouli Lanners), «security manager» joufflu d’un entassement de mobile homes. Faisant équipe, ces deux trognes irresponsables se mettent à la recherche de leur cible volatilisée, héros improbables d’un road-movie absurde qui les mènera jusqu’au havre fiscal de Jersey…

Avec une férocité qui n’épargne personne, à commencer par les exploités, Delépine et Kervern instruisent par le bas le procès du capitalisme dont l’obscénité ne semble pas avoir de limites. Tourné avant la déflagration boursière, leur troisième long-métrage anticipe de façon monstrueuse les méfaits de la crise, suscitant le rire jaune du spectateur. Qui sait, lui aussi en sera peut-être réduit à commander au café du coin «de la moutarde et un verre d’eau du robinet»?
France, 2008, couleur, 1h30, programme n°154