de Arthur Penn |
avec Dustin Hoffman, Faye Dunaway, Martin Balsam, Dan George, Amy Eccles, Richard Mulligan, etc.
Dès ses débuts, le réalisateur américain Arthur Penn s’est toujours intéressé à l’intégration des marginaux dans une société prétendue libre, celle des Etats-Unis: les hippies de «Alice’s Restaurant» (1969), le couple criminel de «Bonnie and Clyde» (1967) ou le jeune immigré yougoslave de «Georgia» (1982). Ainsi, du «Gaucher» (1958), son premier film, à «Missouri Breaks» (1976), en passant par «Little Big Man» (1970), Penn ne semble avoir abordé le genre consacré du western que pour mieux développer cette œuvre qui, toute entière, apparaît comme une parabole sur l’Amérique contemporaine.
Au début du film, un historien se rend au chevet d’un vieil Américain de 121 ans, Jack Crabb (Dustin Hoffman), pour qu’il lui raconte son histoire. A dix ans, orphelin, Jack est recueilli par un Indien Cheyenne, qui l’élève selon les traditions de son peuple. A seize ans, lorsque les soldats attaquent le campement de sa famille d’adoption, Jack retourne à la civilisation dont il est issu. Toute sa vie balancera ensuite entre le monde des blancs, auquel il appartient de par ses origines, et celui des Indiens, dont il se sent beaucoup plus proche. Son destin, tel un récit picaresque mêlant l’horrible à l’absurde, se confond dès lors avec l’histoire des Etats-Unis, jusqu’à la célèbre bataille de Little Big Horn, dernière victoire de la nation indienne sur les troupes du général Custer, avant sa fin inéluctable.
Le premier film de ce cycle sur l’intégration nous convie en fait au spectacle de la désintégration: celle de toute une civilisation — indienne — au profit du colon d’origine européenne. A travers le regard privilégié des Indiens, Penn retrace un siècle de guerre où toute une population va être exterminée au profit d’une autre, au nom du pouvoir, de l’argent, et de la religion. Fable satirique sur l’échec de la coexistence entre deux peuples aux conceptions radicalement différentes, «Little Big Man» constitue, avec «Heaven’s Gate» de Michael Cimino, l’un des rares films qui ait osé montrer comment l’Amérique contemporaine, pays de la fraternité et de la tolérance, s’est construite sur l’exclusion et la violence.
Etats-Unis, 1970, 2h30, couleur; programme n°26