En VOD sur cinefile.ch et filmingo.ch
Marco Bellocchio est l’un des derniers grands maîtres à avoir fait ses débuts en ces années 1960 si fécondes pour le septième art italien. Au fil des ans, ce contempteur infatigable du conformisme a développé une œuvre on ne peut plus décapante. Trempant sa caméra-scalpel dans un vitriol salutaire, Bellocchio n’a en effet eu de cesse de désacraliser les institutions et les idéologies qui selon lui ont façonné et gangrené la société italienne: le fascisme («Vincere»), l’église («Le sourire de ma mère»), la famille («Le saut dans le vide»), l’armée («La marche triomphale») ou encore le terrorisme («Buongiorno notte»).
Avec «Le traître», Bellocchio s’intéresse pour la première fois à la mafia. En résulte un film d’une ampleur inhabituelle pour lui, tant sur le plan financier (avec près de douze millions d’euros de budget) que géographique (tournages en Italie, au Brésil et aux Etats-Unis)… Somptueuse, la première séquence montre une fête où les clans des Corleone, dirigé par Toto Riina, et des Palermitains, que sert Tommaso Buscetta (Pierfrancesco Favino), semblent sceller une alliance prometteuse. Rentré à Rio de Janeiro, d’où il dirige un vaste trafic de drogue, Buscetta apprend pourtant que Toto Riina (Nicola Calì) massacre allégrement son clan pour prendre le pouvoir de Cosa Nostra.
Arrêté par la police brésilienne et extradé, Buscetta annonce au juge Falcone qu’il est prêt à témoigner. S’ensuit un procès inénarrable tenu à Palerme où plusieurs centaines de mafieux vont être appelés à comparaître… Qui est le vrai traître, Buscetta la balance, ou Toto Riina qui a foulé aux pieds le code d’honneur de la mafia? Entre commedia dell’arte hélas bien réelle et drame shakespearien qui s’interroge sur la notion de trahison, un chef-d’œuvre profond et grinçant, servi par des comédiens hors pairs!
Il Traditore
de Marco Bellocchio
Italie/France/Allemagne, 2019, 2h31