A voir lundi 16 juillet 2012 à 22h35 sur Arte
Robert Altman (1925-2006) aura marqué de son empreinte subversive l’histoire récente du cinéma américain. Né à Kansas City, engagé au 307e Groupe de Bombardiers en 1945, Altman réalise le premier de ses trente-cinq longs-métrages en 1968. Il fait ses débuts à Hollywood, alors que l’Usine à rêves connaît une débandade économique sans précédent, et devient le fer de lance d’une génération de jeunes cinéastes contestataires qui tourneront en bourrique des Majors déboussolées en quête de nouveaux talents (Sidney Pollack, Arthur Penn, Jerry Schatzberg, Francis Ford Coppola, etc.)
Après quelques projets avortés, Altman triomphe avec «M.A.S.H.» (1970), jeu de massacre formidable qui abâtardit de façon iconoclaste le film de guerre en l’accouplant au «soap opera». Fort de cet immense succès, le réalisateur se lance dans une série de projets dont l’audace lui vaut très vite l’inimitié des grands studios et un insuccès tenace qui ne semble guère l’ébranler! De «Brewster McCloud» (1970) à «Buffalo Bill et les Indiens (1976) en passant par «Le Privé» («The Long Goodby», 1973) et le monumental «Nashville» (1975), il n’aura de cesse de revisiter les grands récits hollywoodiens, menant une entreprise de démystification sans précédent de cinquante ans d’idéalisation collective.
Antiromantique, Altman fait donc à chaque fois tomber les masques et opère une révision déchirante (parfois même massacrante) de l’histoire américaine vue par Hollywood… «Le Privé» ne fait pas exception, au contraire ! S’emparant du roman noir de Chandler, le cinéaste accomplit un travail de sape remarquable, en faisant du détective privé Philipp Marlow (joué à la perfection par Elliot Gould) un has been désabusé, sans cesse dépassé par les événements, incapable de prendre le contrôle de la situation, comme l’exigerait sa fonction, morigénant à part égale une société dont l’évolution lui échappe et son chat perclus d’habitudes… Ce faisant, Altman ne fait qu’intensifier le pessimisme de l’écrivain!
The Long Goodbye
de Robert Altman
Canada / Etats-Unis, 1973, 1h52