Elena

Ancienne infirmière, Elena est désormais dévouée au confort de son mari Vladimir, un riche septuagénaire. Ils ont chacun un enfant d’un premier mariage. Il a une fille qu’il préserve de tout besoin financier, mais il ne se soucie guère de la famille d’Elena. Celle-ci a pourtant un fils et des petits-enfants qui croupissent dans une cité à l’ombre d’une centrale nucléaire. Elena est bien décidée à leur donner une chance.

Lion d’or à Venise en 2003 avec «Le Retour», dans lequel il décrivait les rapports d’autorité entre un père et ses fils après des années d’absence, primé à Cannes en 2007 avec «Le Bannissement», un drame d’une tenue extraordinaire opposant un homme à son épouse enceinte d’un autre, Andreï Zviaguintsev dissèque à nouveau les drames intimes de l’existence à travers l’histoire d’une famille recomposée.

En digne héritier de Tarkovski, Zviaguintsev manie le plan-séquence avec une grande maîtrise, travaille avec une rigueur extrême les cadrages et une photographie désaturée, joue avec la lumière et les silences, dévoilant peu à peu les contours des gestes qu’Elena répète jour après jour sans rien dire. A travers les déplacements de son personnage, il révèle également le contraste entre l’opulence d’un appartement de luxe et la misère des quartiers délabrés.

Laissant toujours le spectateur libre de sa propre lecture, le cinéaste dépeint une société dominée par l’argent où les puissants se livrent à l’endoctrinement, notamment par le biais de la télévision. En ressort la métaphore d’un constat politique amer, d’une société russe dans laquelle règne l’arbitraire et l’injustice. Alors que la Russie vit sous la botte de Poutine, est-ce un hasard si le mari d’Elena se prénomme Vladimir?

de Andrei Zviaguintsev
Russie, 2011, 1h49

à voir à La Chaux-de-Fonds