A voir au cinéma!
Après «Inglorious Basterds», Quentin Tarantino invoque le fantôme ricanant de «Django», héros en série du défunt western-spaghetti! Le réalisateur de «Kill Bill» raconte en effet une histoire qui se démarque complètement du navet blasphématoire d’origine, réalisé par Sergio Corbucci en 1966… Dentiste de profession, le docteur Schulz (Christoph Waltz) est aussi un chasseur de primes redoutable. Peu avant la guerre de Sécession, il libère un esclave noir (Jamie Foxx) qu’il rebaptise Django et en fait un acolyte pour le moins dévastateur. De son côté, le nouvellement nommé Django espère retrouver sa femme qui a été vendue à Calvin Candie (Leonardo di Caprio), un esclavagiste particulièrement odieux, toujours flanqué d’un domestique de couleur (Samuel L. Jackson), inquiétant d’ambiguïté.
Question forme, Tarantino recycle les éléments opératiques du western-spaghetti sauce Sergio Leone en leur donnant une ampleur jamais atteinte. Selon son habitude, il émaille son film à grand spectacle de ces longues scènes dialoguées dont il a le secret et qui confèrent à son cinéma ce rythme si singulier, fait de surplace implosif et d’accélérations fulgurantes portées par une ironie assassine, laquelle, une fois de plus, déplaira souverainement aux bien-pensants!
Enfin, «Django Unchained» («Django déchaîné» aux deux sens du terme) est sans doute le film le plus clairement politique de son auteur, avec une reconstitution sans fard et terrifiante de l’état d’esclavage qui présida à la prospérité scandaleuse des Etats confédérés d’Amérique. Comme il l’avait fait pour son film précédent, Tarantino use du cinéma comme d’un moyen jubilatoire de rétablir la justice à titre symbolique, offrant aux victimes «nègres» une réhabilitation certes de l’ordre du fantasme, mais dont l’extrême violence, stylisée et trempée à l’ironie froide, est à la mesure de ce que l’Histoire leur a réellement infligé!
de Quentin Tarantino
Etats-Unis, 2012, 2h44
à voir à Neuchâtel (uniquement en séances nocturnes)