Buffalo Bill et les Indiens

A voir mardi 9 octobre 2012 à 14h30 sur Arte |

Décédé en 2006 à l’âge de 81 ans, le cinéaste américain Robert Altman aura marqué de son empreinte subversive l’histoire récente du cinéma américain. Né en 1925 à Kansas City, engagé au 307e Groupe de Bombardiers en 1945, Altman a réalisé le premier de ses 35 longs-métrages en 1968. Il fait ses débuts à Hollywood alors que l’Usine à rêves connaît une débandade économique sans précédent, fer de lance d’une génération de jeunes cinéastes contestataires qui tourneront en bourrique des Majors déboussolées en quête de nouveaux talents (Sidney Pollack, Arthur Penn, Jerry Schatzberg, Francis Ford Coppola, etc.).

Après quelques projets avortés, Altman triomphe avec «M.A.S.H.» en 1970, un jeu de massacre formidable qui abâtardit de façon iconoclaste le film de guerre en l’accouplant au «soap opera». Fort de cet immense succès, le réalisateur se lance dans une série de projets dont l’audace lui vaut très vite l’inimitié des grands studios et un insuccès tenace dont il n’a cure. De «Brewster McCloud» (1970) à «The Long Goodby» («Le Privé») (1973) et le monumental «Nashville» (1975), il n’aura de cesse de revisiter les grands récits hollywoodiens, menant une entreprise de démystification sans précédent de cinquante ans d’idéalisation collective. Réalisé en 1976 avec Paul Newman en tête d’affiche, «Buffalo Bill et les Indiens» appartient pleinement à ce lot impressionnant de déconstruction des mythes.

Western à l’ironie grinçante, ce film revient comme son titre l’indique sur la fondation des Etats-Unis. Pourtant, Buffalo Bill a abandonné ses bisons pour fonder un cirque où il se donne en spectacle, racontant ses exploits. Mauvais tireur, buveur, vaniteux, Buffalo Bill ne se préoccupe que de la continuité de sa légende. Les Indiens font aussi partie du show. Enfin, leur présence est rare, car Sitting Bull n’apparaît que très peu, et seulement pour demander l’indépendance de son peuple. Mais ses interventions ridiculisent complètement le très susceptible le célèbre chasseur-boucher! Confrontant ainsi le spectateur à une représentation très carnavalesque de l’Histoire, le cinéaste parvient à démasquer le simulacre du showbizness et du patriotisme étasunien. Cette distanciation fait de «Buffalo Bill et les Indiens» un pamphlet à la fois cynique et tendre, quoiqu’un brin simplificateur.

Buffalo Bill and the Indians, or Sitting Bull’s History Lesson
de Robert Altman
Etats-Unis, 1976, 2h03