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En 1989, Steven Soderbergh recevait pour «Sexe, Mensonges et Vidéo» la Palme d’or au Festival de Cannes. Imprévisible et prolifique, le bougre y présentait cette année son vingt-cinquième long-métrage, qu’il a annoncé comme le dernier. Dans cette biographie filmée, le cinéaste américain raconte à nouveau les déboires de personnages qui se trompent parmi, autant qu’eux-mêmes: à l’image de la vedette porno de «The Girlfriend Expérience» (2009) et du strip-teaseur de «Magic Mike» (2012), le cabarettiste Liberace et son jeune acolyte évoluent dans un milieu de paillettes, de toc et de pacotilles.
Issu d’un père napolitain et d’une mère d’origine polonaise, Wladziu Valentino Liberace est né à Las Vegas en 1919. Virtuose du piano couvert de strass, Liberace se livrait dans les années 1970 et 1980 à des numéros de music-hall d’un kitsch absolu! Avec l’avènement de la télévision, il est devenu la star préférée des mamies et de nombreux gays américains, même s’il n’a jamais assumé publiquement son homosexualité. Pour réaliser le biopic détonnant de ce chanteur queer par le prisme de sa relation ambiguë avec un jeune éphèbe, Steven Soderbergh a dû faire appel à la télévision, parce que les studios hollywoodiens ont censuré un scénario jugé trop gay pour sortir dans les salles de cinéma américaines…
Un beau soir de l’été 1977, Scott (Matt Damon), un jeune homme de 17 ans issu d’une famille populaire, débarque dans la loge de l’artiste exubérant, interprété par Michael Douglas. Malgré la différence d’âge et de milieu, les deux hommes vont vivre une histoire d’amour camée, hallucinante et décadente, tous deux vêtus de costumes délirants dans les salons néobaroques remplis de lustres et de tableaux rutilants de la «Casa Liberace»… Montrant ces deux corps se dominer l’un l’autre de façon clinique, sans affects, «Behind the Candelabra» (titre original à traduire littéralement par «Derrière le chandelier») confère au luxe vintage de ses décors et de ses personnages une dimension quasi pathétique, celle d’un star-system botoxé hors réalité. Partant, le cinéaste ne fait aucun mystère du pouvoir de l’argent, l’emprise de Liberace se révélant de plus en plus insidieuse, à mesure que Scott se fait charcuter le visage pour lui ressembler… Une réussite, froide et esthétique!
ARP Sélection