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Sauf erreur de notre part, «L’inconnu du lac» est le premier film d’Alain Guiraudie à sortir sous nos latitudes. Les autres titres de ce fils d’agriculteurs natif de l’Aveyron, valaient pourtant tous d’être distribués, notamment son saisissant «Ce vieux rêve qui bouge» (2001) sur le démantèlement d’une usine ou encore «Le roi de l’évasion» (2009), récit picaresque d’un homosexuel virant de bord. Primé à Cannes, radical dans son approche de la sexualité, son quatrième long-métrage est sans conteste l’un des événements cinéphiliques de l’année.
L’été, au bord d’un lac baigné de soleil. On y vient entre hommes, histoire de nager, de draguer et de baiser. Franck (Pierre Deladonchamps) semble faire partie des habitués. En cette après-midi solaire, il lie conversation avec un nouveau-venu qui se tient à distance. Bedonnant et suant, Henri (extraordinaire Jérôme Chapatte) tranche sur les autres plagistes, tous sveltes et bien dans leurs corps.
Chaque jour, Frank vient échanger quelques mots avec Henri qui vient d’être quittée par sa femme. Après quoi, il entre en phase de séduction, en s’efforçant d’attirer l’attention de Michel (Christophe Paou), un autre estivant, lequel, manifestement, suscite son désir. Un autre fois, entre chien et loup, Frank observe de loin Michel noyer son amant. Mais il n’en dira mot au meurtrier, trop amoureux pour différer une étreinte qu’il pourrait pourtant payer de sa vie. Sublime, le dénouement verra Henri tenter de sauver Michel en un élan suicidaire inoubliable…
Au sein d’une nature superbement indifférente, Alain Guiraudie filme ce «thriller amoureux», pour reprendre ses propres mots, avec une sérénité troublante apte à bouleverser tout spectateur adulte, bien au-delà de son orientation sexuelle. Rarement on aura filmé le sexe de façon aussi explicite, sans choquer le moins du monde!
de Alain Guiraudie
France, 2013, 1h37