A voir lundi 11 juin 2012 à 22h sur Arte
A la fois empreint d’expressionnisme et inspiré du réalisme magique cher à Cocteau, «Les Larmes amères de Petra von Kant» est tiré d’une des propres pièces de théâtre de Rainer Werner Fassbinder. Sans chercher à se défaire du côté théâtral de l’œuvre, Fassbinder s’est au contraire servi de son décor unique, un appartement très kitsch, comme de ses dialogues abondants, sans oublier l’immense reproduction de «Midas et Bacchus» de Nicholas Poussin accrochée au mur… Le cinéaste allemand est ainsi parvenu à révéler ses actrices et leur psychologie à la faveur d’une caméra enveloppante et mobile.
Petra von Kant est une styliste très en vogue. Ayant choisi le divorce pour mener une vie de femme libre et indépendantes, elle s’est entourée de Marlene, une secrétaire et dessinatrice dévouée qu’elle use sans états d’âmes. Un jour, Petra tombe follement amoureuse d’une jeune fille prénommée Karine et décide d’en faire le mannequin attitré de ses collections. Las, la passion se transforme alors en amour possessif et destructeur…
De Marlene la servante humiliée, victime de son amour sans fin, à Petra la manipulatrice possessive, en passant par Karine la féline, Fassbinder décrit dans un huis-clos génial et presque entièrement féminin les relations de domination, et plus particulièrement la façon dont on passe du dominé au dominant, et inversement. En cela, le tableau de Poussin sert de métaphore superbe, montrant Midas pris au piège: transformant tout ce qu’il touche en or, il ne peut désormais satisfaire ses pulsions matérielles, sexuelles et sensuelles…
Die Bitteren Tranen der Petra von Kant
de Rainer Werner Fassbinder
Allemagne de l’Ouest, 1972, 2h04