A Leeds dans le comté de Yorkshire, Joseph, un Ecossais bourru et alcoolique, crache ses injures et bat son chien. Imbibé solitaire, il cogne et se cogne à la vie, dévoilant une profonde humanité sous sa carapace de spécimen en voie d’extinction. Il est le tyrannosaure du titre, bien que ce surnom fût d’abord celui d’une autre. Et Joseph de tomber sur le sourire d’Hannah, une femme battue par son petit bourgeois de mari. Pieuse et charitable, elle s’active dans un magasin d’entraide avec la bienveillance de Jésus…
Premier long-métrage réalisé par l’acteur Paddy Considine, «Tyrannosaur» appartient en plein au réalisme social britannique. Porté par la carrure imposante de Peter Mullan, révélé dans «My Name Is Joe» (1998) de Ken Loach, ce film dépeint les cités de Grande-Bretagne avec une extraordinaire violence, dans la lignée du récent «Fish Tank» d’Andrea Arnold.
«Tyrannosaur – A Love Story», c’est aussi l’histoire d’amour de Joseph et Hanna. Alors que l’un est sur la voie de la cicatrisation et que l’autre s’apprête à commettre l’irréparable, ces écorchés vifs se trouvent à la croisée de trajectoires opposées. Leur violence apparaît comme une fatalité, résultant d’une situation dramatique et désespérée. Les criminels comme les victimes y trouvent alors une forme de rédemption qu’ils soient croyants ou non.
En montrant non seulement les passages à tabac, les humiliations et les viols, mais aussi la souffrance de la maladie et les revers de l’aliénation, «Tyrannosaur» exprime l’extrême violence des banlieues délabrées. Enfermés par les tristes façades des immeubles et les fondus au noir qui ponctuent le film, les personnages sont prisonniers de leur condition, piégés par la Grande-Bretagne de «Fuckingham Palace».
Tyrannosaur – A Love Story
de Paddy Considine
Grande-Bretagne, 2011, 1h31
à voir à La Chaux-de-Fonds