Tinta roja

Argentine |
de Carmen Guarini et Marcelo Céspedes |


Ce documentaire «où l’on ne voit rien» est un précieux complément à la vision «cauchemardesque» de «Pizza, birra y faso». Pendant plus d’une heure, nous voilà plongés dans les arcanes du service des faits divers d’un grand journal populaire de Buenos Aires, «Cronica». Avec un entêtement et une discrétion exemplaires, les cinéastes Carmen Guarini et Marcelo Céspedes montrent tout le processus de «fabrication» du fait divers; dans le même temps et sans que le moindre commentaire ne soit nécessaire, ils révèlent le paradoxe qui prend en tenaille ces chroniqueurs indifférents du réel: témoins privilégiés de la faillite terrible du système (attestée par une violence toujours plus présente), ils camouflent leur impuissance derrière le devoir de réserve, s’obstinent à croire à l’utilité de leur fonction (ce en quoi il n’ont pas tout tort) et poursuivent vaille que vaille mais non sans lassitude leur mission d’«utilité publique». Ce sentiment terrible du «trop tard», de l’«après coup» est rendu de façon impressionnante par Guarini et Céspedes qui se refusent à toute interprétation spectaculaire et mensongère de la réalité révélée… Un modèle du genre!
Argentine, 1997, couleur, 1h12; programme n°76