Shame

Non loin de Wall Street, dans un appartement luxueux et impersonnel flanqué de grandes baies vitrées, Brandon, couché nu dans un grand lit garni de draps en satin bleu, nous fixe avec un regard vide, éteint. Il se lève pourtant et va se masturber sous la douche, indifférent aux messages implorants débités par son répondeur. Le reste de la journée va être à l’envi, entre masturbations répétées et saillies consommées avec des inconnues dont il ne veut rien connaître, sinon leur cul. Le reste n’a aucune importance, pas même son travail, si ce n’est une scène significative où Brandon assiste très placidement à la confiscation de son ordinateur infecté par des virus «contractés» sur des sites pornographiques.

Après cette première partie au vide suffocant, le «sex-addict» se voit soudain offrir la possibilité d’une rédemption, avec l’irruption de sa petite sœur Sissy (Carey Mulligan), suicidaire et dépressive, qui vient installer son blues dans son appartement. Profitant de l’occasion pour débarrasser son chez-soi de toutes les traces de sa dépendance, Brandon tente alors de reprendre une vie normale, une tentative vouée à l’échec, qui ne fera que renforcer le dégoût qu’il éprouve pour sa personne.

Star de l’art contemporain, le cinéaste Steve McQueen a abordé le cinéma en 2008 avec «Hunger» (Caméra d’or au Festival de Cannes de la même année) qui relate avec un réalisme quasiment insupportable la grève de la faim menée par l’activiste irlandais Bobby Sands (déjà interprété par Michael Fassbender), jusqu’à ce que mort s’ensuive. Dans «Shame» («La honte»), son second long-métrage, il persiste à filmer un personnage emberlificoté dans une phase d’expiation certes un brin trop volontariste, mais qui apparaît comme le plus cinglant des démentis. Débandant, mais passionnant!

de Steve McQueen
Grande-Bretagne, 2011, 1h39

à voir à La Chaux-de-Fonds