Meurtre d’un bookmaker chinois

de John Cassavetes |
avec Ben Gazzara, Timothy Agoglia Carey, Seymour Cassel, Robert Phillips, Al Ruban, etc.


Deux ans après «Une femme sous influence», Cassavetes démontre dans «Meurtre d’un bookmaker chinois» (1976) l’art et la manière de détourner un genre traditionnel (le thriller) à des fins personnelles. Propriétaire d’une petite boîte de nuit, le brave Cosmo (sublime Ben Gazzara) est incapable de rembourser une dette de jeu à la Mafia; celle-ci lui demande de s’en acquitter en tuant un riche bookmaker qui vit à Chinatown, entouré de gardes du corps. Derrière ce sujet très commun, le spectateur ne peut que discerner, comme en filigrane, la figure du cinéaste indépendant américain et endetté, en butte au système hollywoodien; celui-ci réclamant de celui-là qu’il réalise un film classique en guise d’acte d’allégeance (et de remboursement). A l’instar de Cosmo qui interprète à sa manière le «rôle» (tuer le bookmaker) que lui a assigné la Mafia et diffère sans cesse l’action planifiée par le «scénario» (le meurtre proprement dit), Cassavetes traite de manière complètement imprévue son sujet; privilégiant son personnage, à la fois honnête et corruptible… Bref, d’une humanité confondante!
THE KILLING OF A CHINESE BOOKIE, Etats-Unis, 1978, couleur, 2h15; programme n°52