A voir lundi 14 août 2017 à 20h35 sur RTS Deux |
L’un des derniers chef-d’oeuvres de Melville et sans doute le plus réputé de sa filmographie, «L’Armée des ombres» est une immersion aussi sombre que poignante dans le monde impitoyable de la résistance active, où résignation et abnégation se côtoient et constituent la trame du quotidien. Vingt-cinq ans. C’est le temps qu’il aura fallu à Melville pour digérer cette page de l’histoire dont il a lui-même été l’acteur, et la restituer ici à l’état brut, sourd.
Adapté du roman autobiographique de Joseph Kessel, le film raconte la descente aux enfers de Philippe Gerbier (Lino Ventura), ingénieur des ponts-et-chaussées soupçonné de pensées gaullistes et arrêté par les sbires du régime de Vichy. Aidé par ses acolytes et camarades de fortune, il parvient à s’évader et rejoint à Marseille le bastion résistant dont il est le chef. Ayant repéré le délateur au sein de leurs rangs, Gerbier et ses compagnons se fixent pour objectif de l’assassiner. Poussant toujours plus loin les limites du tolérable, les résistants mettent progressivement entre parenthèse leur humanité au bénéfice d’une idée qui, aussi glorieuse puisse-t-elle paraître, connaît son lot de concessions barbares.
Porté par des acteurs au charisme inégalable (Simone Signoret, Paul Meurisse, Serge Reggiani, Jean-Pierre Cassel pour ne citer qu’eux) et éclairé par Pierre Lhomme, l’un des plus importants chefs opérateurs que le cinéma français ait connu, «L’Armée des ombres» distille avec brio son esthétique crépusculaire, rendant justice à l’histoire comme au cinéma.
de Jean-Pierre Melville
France, 1969, 2h20
