Desperado

A voir vendredi 16 décembre 2016 à 0h00 sur RTL9 |

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Antonio Banderas (El Mariachi) et Salma Hayek (Carolina), armés, burinés, torrides et suants à souhait, avancent – au ralentis s’il vous plaît – avec dans leur dos une boule de feu orange pétante, le tout sur fond de musique chicanos signée Los Lobos…

Emblématique d’un certain cinéma des années nonante, exacerbant la sensualité et la violence jusqu’aux confins (maîtrisées) du kitsch, cette séquence résume à elle seule le film «Desperado» et l’univers cinématographique de son auteur, Robert Rodriguez. Le propos du film? On s’en fiche un peu, si ce n’est qu’il s’agit d’une histoire de vengeance légitime, «état d’esprit» que les Européens qui n’ont jamais fréquenté la frontière américano-mexicaine du côté du Texas ont parfois du mal à «apprécier à sa juste valeur». En effet, le massacre à tour de bras perpétré par El Mariachi – son arme est camouflée dans un étui de guitare – n’est autre qu’un travail de deuil l’aidant à exorciser la mort de sa bien-aimée, assassinée par des trafiquants de drogue.

C’est donc avant tout par son esthétique que ce film se distingue. Plus qu’une mise en scène, Rodriguez signe avec «Desperado» une chorégraphie visuelle. Règlements de comptes, scènes de sexe, courses poursuite: les séquences s’enchaînent avec une grâce et une fluidité remarquables, amplifiées par des teintes brûlantes, un décor et une bande-son qui restituent l’ambiance explosive.

A l’instar de Steve Buscemi, Rodriguez fait partie de la bande de potes de Tarantino, qui a sorti la série Z de sa clandestinité pourtant identitaire. Mais tandis que Tarantino cite, réfère et rend hommage à grand renfort de budgets qui frisent l’indécence, Rodriguez plonge, vit de l’intérieur et restitue avec une sincérité enthousiasmante cet univers de cinéma bis qui est le sien. Cette authenticité, qui perdure jusque dans son dernier «Machete», est précisément ce qui rend son œuvre fascinante et attachante. «Desperado» est aussi l’occasion de retrouver les tronches de Rodriguez: son Banderas (face B de celui d’Almodovar), l’affûtée et sublime Salma Hayek et bien sûr le vigoureux Danny Trejo for ever…

de Roberto Rodriguez
Etats-Unis, 1995, 1h55