Belle

Au royaume de l’animation japonaise, Mamoru Hosoda est un roi qui nous offre à intervalles réguliers des chefs-d’œuvre comme «La Traversée du temps» (2006), «Summer Wars» (2009) ou encore «Les Enfants loups, Ame et Yuki» (2012). Après «Le Garçon et la bête» (2015), fable fantastique sur l’apprentissage, et «Miraï, ma petite sœur» (2018), qui décrit avec une sensibilité rare le quotidien d’un enfant bouleversé par l’arrivée d’une petite sœur, Hosoda nous gratifie d’un joyau de la même eau avec «Belle», son septième «anime» de long-métrage.

S’inspirant librement du conte «La Belle et la Bête», le cinéaste nous plonge dans le monde de U, le plus grand espace Internet jamais constitué, où s’agglutine une communauté virtuelle innombrable. Soumise au diktat de ses sponsors, cette cybersociété vit au rythme effréné des commentaires de ses membres qui profitent de leur anonymat pour répandre leur fiel. Idole pop adulée sur les réseaux sociaux, Belle est l’avatar de Suzu, une jeune lycéenne introvertie qui, dans la vraie vie, habite dans l’île de Shikoku, un univers verdoyant très éloigné du monde sans âme de U. En secret, Suzu aspire à redevenir elle-même, à échapper à la dévoration de son avatar de chanteuse désincarné… D’une beauté formelle inouïe, le film de Hosoda apparaît comme une critique magistrale, mais dénuée de tout manichéisme, de la dérive digitale qui corrode le moindre de nos affects.

Belle: Ryu to Sobakasu no Hime
de Mamoru Hosoda
Japon, 2021, 2h02