A voir lundi 15 février 2016 à 0h35 sur Arte |
Huitième film muet du futur auteur de «M le Maudit» (1931), «Les Trois Lumières» («Der müde Tod», 1921) constitue son premier chef-d’œuvre et l’un des manifestes du cinéma expressionniste (avec «Nosferatu le Vampire» de Murnau, réalisé deux ans plus tard).
Un prologue asphyxiant voit une jeune fille supplier La Mort (interprété de façon inoubliable par Bernhard Goetzke) d’épargner son jeune fiancé. Lasse, la Mort veut bien exaucer son souhait, à la condition qu’elle se montre capable de sauver l’un des trois vies symbolisées par autant de cierges qui se consument…
Cette entrée en matière d’une beauté plastique insurpassable permet au réalisateur de conter au spectateur trois histoires qui forment une allégorie pessimiste sur notre incapacité tragique à contrer le Destin. La première se déroule à Bagdad, au temps des califes, la seconde à Venise, à l’époque de la Renaissance, et la troisième dans l’ancienne Chine.
Ces trois ancrages temporels différents permettent à Lang d’adopter une multitude foisonnante d’esthétiques, passant sans cesse de la satire au drame, créant un climat onirique mémorable. La Mort est fatiguée d’accomplir son labeur, mais elle-même y est contrainte. Poème visuel d’une richesse extraordinaire, «Les Trois Lumières» stupéfie à chaque vision par son brio narratif et la manière, jamais pesante, de nous rappeler à la dure loi de l’existence qui finit, quoi qu’on y fasse, par l’anéantissement et l’extinction!
Der müde Tod
de Fritz Lang
Allemagne, 1921, 1h45