A voir dimanche 11 septembre 2016 à 20h55 sur France 2 |
En quelques films à poigne, la cinéaste Kathryn Bigelow s’est attirée le respect d’un milieu professionnel encore très masculin, du moins à Hollywood. Après l’impressionnant et multi-oscarisé «Démineurs» (2008), la réalisatrice de «Strange Days» (1995), qui reste toujours ce qu’elle a fait de mieux à ce jour, s’emploie à faire entrer dans le moule du film d’action à grand spectacle la longue traque de Ben Laden, jusqu’à l’assaut final donné contre sa résidence pakistanaise, avec l’issue que l’on connaît.
Force est de constater qu’elle arrive parfaitement à tirer son épingle du jeu, en se faisant l’auteur d’un digest tout à fait acceptable d’une chasse à l’homme sans précédent qui aura duré presque dix ans, en lui donnant la touche vériste nécessaire à notre adhésion. Comme de bien entendu, le spectateur n’échappe pas au carton préliminaire de circonstance qui l’avertit que tout ce qui va suivre découle de témoignages de première main, un avertissement d’autant plus efficace qu’elle nous le donne à lire sur fond sonore de lamentos horrifiés de victimes, elles bien réelles, des attentats du 11 septembre!
Dans la première séquence, Kathryn Bigelow poursuit son appropriation très rouée du réel en nous infligeant une séance de torture nullement édulcorée, avec tout le kit de supplices dont ont parlé en abondance les médias à l’époque. Dès lors sûre de son coup, elle peut nous arrimer au personnage à fort potentiel identificatoire de Maya (Jessica Chastaing), une agente de la CIA qui va faire de la traque de Ben Laden sa hantise, rejoignant une galerie de personnages obsessionnels chers à la cinéaste depuis belle lurette.
A partir de là, tout roule, pris dans la nasse pseudo-documentaire, le spectateur donne sans coup férir son absolution à ce thriller simplifiant la vérité historique comme un rouleau-compresseur! Toute à sa maîtrise d’un suspense qui finit par être vraiment hallucinant dans son dernier acte (la prise du repaire de Ben Laden), Bigelow fait alors de son film un acte de pur divertissement, sans aucune distance ni réflexion à l’égard de ce qu’il montre, mais efficace en diable… Pour autant, «Démineurs» flanqué de son héros suicidaire était autrement ambigu!
de Kathryn Bigelow
Etats-Unis, 2012, 2h29