A voir lundi 16 novembre 2015 à 1h15 sur France 2 |
Eric Rohmer (1920-2010) est un grand cinéaste à la discrétion trompeuse. Passant à tort pour un classique, ce qui ne l’a pas gêné le moins du monde, ce Corrézien, né Jean-Marie Schérer en 1920 à Tulle, aura fait preuve d’une insolence créative sans pareille, tout au long d’une carrière d’une longévité exceptionnelle. Professeur de lettres se destinant en premier lieu à la littérature, Rohmer aborde le cinéma en animant un ciné-club du Quartier Latin à Paris, fréquenté par de jeunes trublions qui ont pour noms Claude Chabrol, François Truffaut et Jean-Luc Godard. Avec eux, il fomente le soulèvement de la Nouvelle Vague, à la fois comme critique à la revue des Cahiers du Cinéma et réalisateur.
Dès 1950, Rohmer tourne son tout premier court-métrage, ce qui fait de lui le pionnier du mouvement. Abandonnant son poste de rédacteur en chef des Cahiers en 1963, il se consacre dès lors à la réalisation. Optant pour des petits budgets pour conserver toute sa liberté d’auteur, ce janséniste frondeur va se révéler prolifique, signant une cinquantaine de titres, dont vingt-six long-métrages. Son œuvre se décline en cycles, à commencer par celui des «Contes moraux», dont le sixième, «Ma Nuit chez Maud» (1969) lui vaut son premier succès public.
Au centre de Clermont-Ferrand, lors d’une messe dominicale, Jean-Louis aperçoit la jeune Françoise, une belle blonde qu’il compte bien épouser. Il expose alors ses projets à Vidal, un ancien camarade de classe, qui lui présente la ténébreuse Maud. Divorcée, médecin, moderne et intellectuelle, celle-ci parvient à ébranler les convictions de Jean-Louis…
Derrière ses longs dialogues philosophiques (Eric Rohmer interroge Blaise Pascal à travers le rapprochement de deux êtres que tout oppose), «Ma Nuit chez Maud» reflète avec force et authenticité la jeunesse petite-bourgeoise des années 1970, alors empêtrée dans ses contradictions morales et religieuses. Symbole de cette dualité, Jean-Louis hésite entre la raison (Françoise) et la passion (Maud), un conflit de l’âme que le cinéaste a eu l’élégance de représenter avec un sublime noir et blanc. Probablement le chef-d’œuvre de son auteur!
de Eric Rohmer
France, 1969, 1h50