Mado

A voir mardi 13 mai 2014 à 13h45 sur Arte |

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Peintre génial de la bonne comme de la «mauvaise» société française, Sautet a élaboré un concept de mise en scène en adéquation parfaite avec son sujet, neutre, quasi atonal, rendant à la perfection le conformisme de ses protagonistes en proie au désenchantement. Avec un peu d’attention, le spectateur perçoit pourtant au-delà de la surface lisse des choses et des êtres de l’univers «Sautet» comme une indignation qui couve mais ne prend jamais. C’est que, chez Sautet, la simplicité n’est jamais aussi «simple» qu’elle en a l’air! Cet «oiseau qui chante dans son arbre généalogique» (pour reprendre un mot de Cocteau) a notamment livré cinq grands films de la décennie septante — «Les Choses de la vie» (1970), «Max et les ferrailleurs» (1971), «César et Rosalie» (1972), «Vincent, François, Paul et les autres» (1974)… et «Mado» en 1976.

Accusant le suicide de son associé, le promoteur immobilier Simon Léotard est au bord de la faillite. C’est alors que Lépidon, un concurrent verreux, remet sur la table de vieilles affaires qui le liaient au défunt: de l’argent doit être remboursé! Face à l’urgence, Simon demande à Mado, une prostituée pour laquelle il nourrit des sentiments amoureux, de faire jouer ses relations pour obtenir des informations compromettantes sur Lépidon…

Film préféré de son auteur, «Mado» repose entièrement sur un thème cher au cinéaste: celui de la chute inéluctable de l’individu dans la société. Les personnages de «Mado» se cherchent, luttent et s’éloignent et tandis que les femmes triomphent, les hommes dégringolent, incapables de s’affirmer sur le plan émotionnel. Joué par des acteurs de renom, de Michel Piccoli à Ottavia Piccolo en passant par Jacques Dutronc, ce drame social vibre d’une intensité particulière, presque nihiliste, qui pourrait expliquer la préférence du public pour des œuvres plus légères qui ne leur renverraient pas le reflet de leur propre existence.

de Claude Sautet
France, 1976, 2h15