Toni

A voir lundi 24 mars 2014 à 0h25 sur France 2 |

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Fils du grand peintre impressionniste dont il a vendu quelques toiles pour financer ses films, Jean Renoir appartient au gotha des cinéastes qui, dans les années 1930, ont fait évoluer de façon décisive le septième art. Représentant d’une classe sociale privilégiée qu’il sait être en voie de disparition, mais dont il ne renie pas l’héritage humaniste intellectuel et culturel, Renoir est en sympathie avec les idées du parti communiste. Cette ambivalence, le réalisateur de «La Grande illusion» (1937) la surmonte en privilégiant par-dessus tout son amour des personnages.

De façon géniale, il traduit en termes cinématographiques l’adage redoutable qui énonce que «chacun a ses raisons», ce qui implique qu’un bon cinéaste doit aimer un tant soit peu tous ses personnages, même les plus salauds! Selon Renoir, c’est même la condition impérative pour échapper à la réduction fonctionnelle à l’œuvre dans la plupart des films et accéder à un véritable «réalisme intérieur».

Comme beaucoup de ses compatriotes italiens, Toni s’est rendu en Provence où il travaille comme ouvrier dans une carrière. Il est l’amant de Marie, sa logeuse, mais il est fou d’amour pour Josépha, une jeune Espagnole dont le père, propriétaire terrien, a joliment prospéré. Malheureusement, il n’est pas le seul à convoiter la jeune femme, mais aucun autre prétendant ne serait prêt à renoncer à son intégrité par amour pour elle…

Produit par Marcel Pagnol, «Toni» a une importance historique capitale puisqu’il est considéré comme l’instigateur du néoréalisme italien. Alors assistant-réalisateur de Renoir, Luchino Visconti a profondément été marqué par l’approche documentaire du cinéaste durant le tournage: moyens limités à l’extrême, prise de vue en décors réels (extérieurs), absence d’interventions sonores extérieures à l’histoire et rôles secondaires campés par des amateurs recrutés sur place. Peinture réaliste d’un moment de l’histoire où le mélange des cultures fleurait encore bon un sentiment de fraternité et d’enrichissement, «Toni» est une œuvre indispensable, largement méconnue au regard de «Nana» (1926), «La Bête humaine» (1938) ou encore «La Règle du jeu» (1939).

de Jean Renoir
France, 1934, 1h30