A voir mardi 18 août 2015 à 22h45 sur RTS Deux |
Pour son dix-septième long-métrage, Gatlif persiste et signe dans sa quête identitaire, en évoquant le génocide rom, que l’on désigne sous le nom de «Samudaripen» («Tuez-les tous»), une tragédie dont le cinéma ne s’est jamais vraiment fait l’écho. Entre 250’000 et 500’000 gitans ont pourtant été exterminés par la Gestapo, avec l’aide active des administrations de presque tous les pays européens occupés. Cette complicité monstrueuse explique sans doute, en partie, notre réticence à représenter cette ignominie.
Nous sommes en 1943. Des Tziganes fuient à travers la campagne française, poursuivis par des Nazis qui ont décrété leur extinction. Arrivés dans un petit village, où ils avaient l’habitude de faire les vendanges, les nomades doivent déchanter. Sous le couvert de l’Occupation, certains habitants manifestent sans gêne leur racisme, se promettant de rameuter au plus vite les sbires de la Gestapo. Par chance, deux «justes», le maire (Marc Lavoine) et l’institutrice (Marie-Josée Croze), elle-même membre de la résistance, vont venir en aide aux «vagabonds». Ainsi l’édile n’hésite pas à faire une donation qui les fait propriétaires de son domaine familial. Las, cet acte courageux va mettre le feu aux poudres…
Pour évoquer cette page sombre de l’histoire des siens, Gatlif a laissé de côté son style habituel, tout en transe, pour une reconstitution des faits, lucide et sans pathos… En résulte une œuvre empreinte d’une grande dignité et de cet humour fataliste propre aux gens du voyage. Au-delà du devoir de mémoire, «Liberté» nous interroge en profondeur sur notre rapport aux gitans dont le mode de vie «errant» reste absolument antithétique à notre modèle de société très organisée. Leur refus absolu de toute assimilation demeure pour certains toujours aussi intolérable. Certes, leur génocide n’est plus programmé, mais la manière dont nous continuons à les considérer montre que le problème reste entier.
de Tony Gatlif
France, 2008, 1h51