A voir jeudi 23 août 2012 à 23h45 sur RTS Deux
Réalisé en 1979, «Sauve qui peut (la vie)» marque le retour de Jean-Luc Godard au «vrai» long-métrage de cinéma, après des années d’expérimentations vidéo, de films militants et de voyages autour du monde, notamment en Palestine et au Liban, ainsi qu’un grave accident de moto, une longue hospitalisation, sans oublier sa rupture d’avec Truffaut suite à «La Nuit américaine».
«Composé par Jean-Luc Godard», ce «Film de référence interdit aux mineures de dix-huit ans» (tel que l’indique le générique) raconte quatre histoires, sur l’amour, le travail et l’argent… la musique. D’une part, Denise Rimbaud (Nathalie Baye dans l’un de ses meilleurs rôles) décide de changer de quotidien suite à sa rupture avec Paul Godard (Jacques Dutronc), d’autre part ce dernier éprouve difficilement cet abandon à venir. En outre, Isabelle Rivière (Isabelle Huppert), un prostituée, se présente pour louer l’appartement de Denise et l’initie au commerce de son corps. Enfin, des musiciens nouent ensemble tous les fils de ces récits.
Usant du ralenti à de nombreuses reprises, effectuant comme toujours un travail singulier né de la confrontation entre l’image et le son (les dialogues et la musique), tirant parti d’un «méta-langage» mis dans la bouche des acteurs, Godard s’efforce de saisir à travers «Sauve qui peut (la vie)» le geste même de la vie. Il le révèle alors pris en étau dans un monde marqué par l’indifférence, pourri par le fric, où les rapports de force, corrompus et inchangés, sévissent. Autrement dit, par le biais d’une mise en scène quasi «analogique», le film montre que les putains ou les petits bourgeois subissent de la même manière l’asservissement des puissants. Admirablement portée par une superbe brochette d’acteurs et d’actrices pris dans leurs séduisants atours de jeunesse, cette tragédie (de la vie) n’a donc pas pris une ride (si ce n’est dans son apparence purement «diégétique»). «Sauve qui peut (la vie)» reste un film de génie!
de Jean-Luc Godard
France / Suisse, 1979, 1h30