A voir lundi 3 octobre 2016 à 22h15 sur France 4 |
Cinéaste de «fiction» engagé et formé à la télévision, le Britannique Paul Greengrass a redonné au film d’action ses lettres de noblesse en lui appliquant un traitement réaliste, souvent proche du reportage. Réalisateur du premier et du troisième volet de la saga Jason Bourne («La Mort dans la peau» et «La Vengeance dans la peau»), Greengrass a forgé son style à la lisière du documentaire sur «Bloody Sunday» (2002), une évocation sèche des tragiques événements de 1972 qui rallumèrent la guerre civile en Irlande du Nord (Ours d’Or à Berlin), et, surtout, «Vol 93» (2006), reconstitution en temps réel du crash sacrificiel du quatrième avion détourné par Al-Qaida, le 11 septembre 2003.
S’emparant d’un «treatment» écrit par le scénariste Brian Helgeland, sans doute l’un des meilleurs de sa profession (on lui doit notamment le script de «Mystic River» de Clint Eastwood), le réalisateur vient cette fois fouailler les dessous peu reluisants de la deuxième guerre «préventive» d’Irak. Officier de l’armée américaine, l’adjudant-chef Roy Miller (Matt Damon) est ce que l’on appelle un bon soldat. Au printemps 2003, il accepte sans rechigner de partir à la recherche de très hypothétiques armes de destruction massive, histoire de légitimer l’intervention américaine qui, pour mémoire, a été engagée par Georges W. Bush et ses alliés anglais sans avoir obtenu l’aval d’une ONU très dubitative. L’enjeu est donc de taille! Ratissant le désert irakien, Miller et ses hommes passent au peigne fin et non sans bravoure des sites tous plus piégés les uns que les autres, sans obtenir de résultats flagrants, sinon d’éprouver la désagréable impression d’être constamment sous surveillance. Au final, l’idéal de vérité du brave adjudant-chef en sera ébranlé…
Certes, Greengrass ne nous apprend rien de vraiment nouveau. Depuis belle lurette, le simple pékin est informé des manipulations et arrière-pensées qui ont présidé à la «libération» de l’Irak. Plus que par son intrigue, somme toute assez convenue, et ses révélations, déjà un brin éventées, son septième long-métrage pour le cinéma emporte l’adhésion grâce à sa mise en scène, remarquable en tout point. Dédaignant les images trafiquées du tout numérique, le réalisateur préfère toujours accorder sa confiance à des figures éprouvées du cinéma documentaire, entre autres les plans filmés en caméra portée. Ce faisant, il confère à son film de guerre une sensation de réalisme étonnante, qui tranche sur la production hollywoodienne courante.
de Paul Greengrass
Etats-Unis / Grande-Bretagne, 2010, 1h55