L’Île aux oiseaux

Œuvrant de concert, les cinéastes suisses Maya Kosa et Sergio da Costa se sont fait connaître des cinéphiles grâce à un premier long-métrage fascinant, «Rio Corgo» (2015), tourné dans un hameau perdu du Trás-os-Montesa, au nord-est du Portugal. A la lisière du documentaire et de la fiction, leur premier essai réussissait à sublimer une région déshéritée, atteignant à la plus vive émotion poétique.
Avec «L’île aux oiseaux», Kosa et Da Costa confirment leur talent incroyablement singulier de documentaristes. Salué à Locarno, leur nouveau film a pour théâtre le Centre ornithologique de Genthod, près de l’aéroport de Genève, où travaillent des personnes en réinsertion professionnelle, transbahutant un vécu que l’on devine difficile, pour ne pas dire plus.

C’est le cas d’Antonin, un jeune homme au doux visage, qui semble empreint d’une fatigue perpétuelle. Comme ses pairs meurtris par la vie, Antonin recueille et soigne les oiseaux blessés qui n’ont pas su ruser avec les dangers de la vie moderne, dont les avions qui décollent et atterrissent sans relâche non loin de là. En son for intérieur, Antonin espère que ses protégés revoleront un jour de leurs propres ailes.
A la faveur du plan-séquence, Kosa et Da Costa tissent tout en douceur une métaphore foudroyante qui serre le cœur du spectateur. A la fin de son séjour à Genthod, Antonin pourra-t-il «être relâché» dans ce monde qui se montre souvent impitoyable envers les plus faibles? Du grand cinéma humaniste, comme on n’en voit trop rarement aujourd’hui!

de Maya Kosa et Sergio da Costa
Suisse, 2019, 1h01