En présence d’un clown

En 1982, «Fanny et Alexandre» devait être le dernier film du génial cinéaste suédois. Ce sera plutôt son dernier film destiné au grand écran, puisque Bergman a poursuivi son art de la mise en scène dans une dizaine de téléfilms, en parallèle à son activité théâtrale. Ainsi, à 80 ans, il réalise «En présence d’un clown» pour la télé, tiré de sa pièce «S’agite et se pavane». Le film a connu une exploitation en salles cet hiver (en France) et sort aujourd’hui dans une édition DVD comprenant le making-of du film, signé par Bergman lui-même. En 1925, enfermé dans un asile psychiatrique, l’inventeur excentrique Carl Akerblom prévoit d’organiser une séance de cinéma parlant avant l’heure. Avec son acolyte, ils tournent un film dont le récit juxtapose les amours tumultueuses d’une prostituée vierge et la mort de Schubert… Or durant la projection, la pellicule prend feu. Les acteurs, qui se doublaient en direct, sont alors forcés d’interpréter la fin du film sous forme de pièce de théâtre. Les obsessions et les passions artistiques de Bergman s’emboîtent le pas dans cette œuvre aux allures testamentaires. Un film prophétique? La mort pressentie du cinéma, celle annoncée du cinéaste? Dans une séquence onirique, la mort apparaît à Carl Akerblom sous les traits d’un clown blanc au féminin… qu’il prend par derrière, en toute allégresse. La réponse doit être là, directe, envoûtante, poétique.

Capricci