Après «La Loi du marché», Stéphane Brizé livre une excellente adaptation du premier roman de Maupassant, «Une vie», paru en 1883. Fidèle à cet ouvrage qui retrace la vie entière d’une femme aux prises avec l’égoïsme des hommes, le film de Brizé s’inscrit en plein dans sa filmographie aux accents rebelles et contemporains… Dans la Normandie du 19ème siècle, Jeanne Le Perthuis des Vauds a quitté le petit château de ses parents pour parfaire son éducation au couvent. De retour, la jeune aristocrate est mariée à Julien de Lamare, un noble bien sous tous rapports qui est en réalité brutal, avare et volage. Rongée par le chagrin, Jeanne va tomber en dépression et sacrifier ses biens.
Pour rendre ces vingt-sept ans de vie malmenée par l’adultère, l’hypocrisie, l’appât du gain et l’intolérance, Stéphane Brizé a choisi de filmer son personnage dans un format carré 4/3 et de le suivre dans ses tâches quotidiennes, saison après saison. Jouant avec les couleurs et un décalage fort bien senti entre le présent et une voix off littérale, le cinéaste se livre à des ellipses qui accélèrent le temps et des flash-backs qui débutent sans prévenir. La vie de Jeanne est ainsi décrite d’une manière si naturaliste qu’elle évite à merveille le mélo. Dans le rôle principal, Judith Chemla exprime toute l’innocence frondeuse de son personnage. En résulte une adaptation d’une modernité fascinante.
de Stéphane Brizé
France/Belgique, 2016, 1h59