Sweet Sixteen

A voir vendredi 11 novembre 2016 à 2h20 sur Arte |

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C’est au moment où il songeait réaliser «Carla’s Song», en 1996, que le cinéaste britannique Ken Loach a rencontré l’Ecossais Paul Laverty, ancien avocat travaillant alors dans une organisation humanitaire. Devenu scénariste, Laverty va écrire pour Loach un film merveilleux sur la (dure) réalité écossaise, et le chômage en particulier, «My Name is Joe» (1998). Après «Bread and Roses» (2000), sur la condition des femmes de ménage latino-américaines aux Etats-Unis, il signe «Sweet Sixteen», qui lui vaut le Prix du scénario à Cannes et une drôle de confrontation avec le gouvernement anglais: la langue utilisée par les jeunes adolescents du film est beaucoup trop vulgaire pour être entendue par de jeunes oreilles…

En fait, parlé dans un écossais rocailleux parfaitement authentique, «Sweet Sixteen» montre le revers de la médaille de «My Name is Joe», où le récit était (malgré tout) nimbé d’espoir… Ici, Liam, un adolescent désœuvré comme son ami Pinball, rêve de faire un cadeau à sa mère, qui va prochainement sorti de prison. Lui offrir un bel appartement dans un des nouveaux immeubles de Greendock, dominant la mer. Mais le seul moyen pour Liam de gagner cet argent est d’entrer dans l’illégalité, en vendant de la drogue. Motivé (et aveuglé) par son idéal, Liam devient vite un petit caïd et parvient à ses fins… Mais sa mère n’a que faire d’un appartement.

«Sweet Sixteen» est ainsi le film de la désillusion. Celle du personnage de Liam, dont les rêves se brisent face aux écueils de la réalité. Mais aussi celle du cinéaste, homme de gauche convaincu, plus que déçu du gouvernement Blair. Pour Loach et Laverty, le gouvernement de Londres considère l’Ecosse comme une colonie dont il ferme les grandes industries sans se soucier du chômage provoqué, sans prévoir de plans de réinsertion, ni de programmes d’éducation. Les jeunes Ecossais de Greenock ou Glasgow n’ont d’autres possibilités dans la vie que de glander, voler des voitures ou vendre de la drogue. D’un réalisme confondant, d’une tension constante et d’un détachement sensible, ce film de Ken Loach est aussi l’un des plus désespérants qu’il ait signé.

de Ken Loach
Grande-Bretagne / Espagne / Allemagne, 2002, 1h46