Skyfall

A voir samedi 7 novembre 2015 à 20h45 sur RTS Un |

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Autant vous prévenir, le vingt-troisième long-métrage de l’une des franchises les plus juteuses de l’histoire du cinéma (cinq milliards de dollars amassés depuis 1962) inflige un bien rude traitement au preux et autrefois séduisant James Bond (Daniel Craig)! Après une course-poursuite stambouliote étourdissante, à laquelle notre protagoniste, comme le spectateur, ne comprend goutte, l’espion au service de sa majesté merde complètement sa mission. Porté disparu, présumé mort, Bond revient penaud au bercail londonien. Au MI6, dont les politiques jugent les méthodes obsolètes, un nouveau chef de service que l’on devine adepte du «new management» lui fait repasser un test d’aptitudes comme à un bleu. Usé, physiquement diminué, l’ex-tombeur de ces dames échoue lamentablement!

Peu après, l’Agence est pulvérisée par un attentat et tous les agents du MI6 qui ont infiltré des mouvements terroristes de par le monde voient leurs identités dangereusement divulguées. Ce malheureux concours de circonstances a le don de tirer Bond de sa retraite anticipée, pour le faire affronter un méchant d’anthologie… Réalisateur «oscarisé» de «American Beauty» (1999) et des «Noces rebelles» (2009), le Britannique Sam Mendes chérit les personnages névrosés. Il fait donc son miel du sieur Bond, espion né de la Guerre froide et de son clivage «rassurant», mais aujourd’hui complètement dépassé par notre univers «globalisé»!

Malin, il sacrifie aux scènes imposées par le genre, mais en s’en acquittant avec art, notamment dans la scène, sublime, de l’immeuble shanghaïen tout en surfaces réfléchissantes, qui cite Orson Welles et Wong Kar-wai. Dans le même temps, il débarrasse peu à peu son personnage de ses oripeaux génériques, virant au plus vite les James Bond girls, au profit de M (comme maman) qui devient la véritable protagoniste féminine (Judy Dench) du film. Tout se conclut par une scène quasi primitive qui voit Bond revenir dans les landes écossaises de son enfance, dévoilant un roman familial tourmenté. Subtil, Mendès prend alors une posture d’auteur, faisant de l’espion que l’on aimait un orphelin d’une époque désormais révolue et du genre cinématographique qui va avec… «Pourquoi ne pas rester mort?», susurre à Bond son successeur potentiel, un «cybernerd» bouffé par l’acné.

de Sam Mendes
Etats-Unis / Grande-Bretagne, 2012, 2h23