A voir vendredi 17 février 2017 à 13h55 sur Arte |
«T’as de beaux yeux, tu sais.» Devenue culte, la réplique est dans la bouche de Jean Gabin étreignant Michèle Morgan avant de l’embrasser dans «Le Quai des brumes» de Marcel Carné. Film manifeste du réalisme poétique inspiré de l’esthétique expressionniste, ce grand classique et condensé de superbes dialogues signés Prévert fait le constat de la désespérance sur le mode de la fatalité et sur les pavés mouillés d’un Havre où l’amour est un leurre, plongeant ses victimes dans un état agonisant au milieu d’un paysage désolé.
Tourné dans les premières semaines de 1938, premier grand succès de Carné, transposé d’un roman de Mac Orlan situé à Montmartre vers 1900, «Le Quai des brumes» nous propulse au Havre dans les années 1930. Et voici que débarque un déserteur de l’armée de colonisation et qu’il tombe sous le charme d’une jeune fille nommée Nelly. Par amour, il va l’arracher à son infâme tuteur, la sauver sans pouvoir se sauver lui-même…
Porté par le couple mythique Gabin et Morgan (elle a alors 18 ans), le film est certes très pessimiste. Pour l’anecdote, la brume est obtenue sur le tournage en faisant brûler du goudron. Cependant, le lyrisme de Carné et les dialogues délirants de Prévert le font basculer dans une poésie dont la noirceur reste sublime. Il n’y pas d’amour heureux!
de Marcel Carné
France, 1938, 1h31