Precious

A voir mardi 21 avril 2015 à 23h25 sur RTS Deux |

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New York, dans le quartier défavorisé de Harlem, au cœur de ces années quatre-vingt où sévit le néolibéralisme cruel si cher au président Reagan… L’existence de Precious Jones ne respire pas le bonheur, c’est le moins que l’on puisse dire! Adolescente de seize ans rêvant d’être blonde et mince, Precious vit un véritable calvaire. Elle est noire, obèse, illettrée et a été violée par son père, avec à la clef Mongo, un enfant trisomique. De nouveau enceinte, Precious doit en plus affronter la violence quotidienne de sa mère hystérique. Cerise sur le gâteau, elle est renvoyée du lycée qui ne tolère pas sa seconde grossesse, ce qu’elle vit comme un véritable drame, car elle comptait sur les études pour s’en sortir!

Prenant ses cliques et ses claques, la «grosse» décide de se tirer de chez elle. Mue par un instinct irrépressible de survie, Precious fréquente alors une école alternative qui lui reconnaîtra un don certain pour les maths… Tiré de «Push», livre culte de la romancière et poétesse Sapphire publié en 1996, «Precious» n’est en rien une exagération. Le destin très contrarié de sa protagoniste est partagé par d’innombrables jeunes afro-américaines en détresse!

Malgré une mise en scène sans trop de caractère, le film agrippe le spectateur pour ne plus le lâcher. Très rusé, le scénario y est pour beaucoup. Traités sans aucun manichéisme, ses personnages ont en effet ce qu’il faut de complexité pour décourager toute interprétation simpliste, même les moins sympathiques, à l’instar de Mary, la mère de Precious.

Autre point très décisif, le réalisateur Lee Daniels a su restituer dans ses dialogues la langue furieuse du livre d’origine, qui finit toujours par excéder les pensées de ses locuteurs, mais qui n’en reste pas moins leur seul moyen d’exister, de trouver leurs marques identitaires. De même, le féminisme qui imprègne le propos n’est pas édulcoré: hors les femmes, vraiment point de salut! Enfin, dans le rôle-titre, Gabourey Sidibe nous gratifie d’une prestation époustouflante, emplie d’une grâce, d’une légèreté mystérieuses d’antinomie. Elle aurait mérité à tout le moins de décrocher l’Oscar. Frileuse, l’Académie lui a préféré la plastique plus rassurante de Sandra Bullock!

Precious: Based on the Novel ‘Push’ by Sapphire
de Lee Daniels (I)
Etats-Unis, 2009, 1h49