A voir lundi 29 juillet 2013 à 20h50 sur HD1 |
Plus que son propos proprement dit, ce qui frémit avec une belle insistance dans le troisième long-métrage de Nicole Garcia c’est la sensation forte, bien qu’impalpable, d’un accord de sensibilité formidable qui advient le temps d’un film entre deux femmes d’un «certain âge», la cinéaste (52 ans) et (peut-être) son double, l’actrice Catherine Deneuve (55 ans), phénoménale dans le rôle Marianne Malivert, épouse malade et alcoolique d’un fameux joaillier de la place Vendôme où se concentre la plupart des diamantaires parisiens.
Actrice majeure (elle a joué pour Tavernier, Rivette, Resnais, Sautet, Deville, etc.) passée à la réalisation en 1990 avec le superbe «Un week-end sur deux», Garcia a éprouvé le vertige douloureux de la mise en abîme de soi-même qu’expérimente tout comédienne digne de ce nom. Icône amusée des produits de luxe, Deneuve, non sans jubilation, s’est efforcée, dans la deuxième partie de sa carrière (depuis «Drôle d’endroit pour une rencontre» de François Dupeyron, 1988) de casser son image «papier glacé».
Cette entreprise de «démasquement» atteint des sommets avec «Place Vendôme». Aussi mondaine que paumée, Deneuve redevient sous la houlette de Garcia une parfaite inconnue universelle: sortant démaquillée et décoiffée d’une cure de désintoxication, Marianne Malivert, suite au suicide de son mari, doit reprendre le «métier». Des diamants volés, qui étaient en possession de son époux l’entraînent à son corps défendant dans une affaire trouble. Dans le même temps, le passé remonte d’un coup avec la réapparition d’un ex-amant (Jacques Dutronc, très crédible en homme las) qui gêne un brin son amant du jour (Jean-Pierre Bacri, parfait lui aussi) qui va se révéler sous un très mauvais jour…
Très bien documentée sur le monde et les pratiques particulières des diamantaires, la cinéaste n’en désoriente pas moins le spectateur qui rechercherait des points de repères: lieux volontairement rendus quelconques (hôtels, bars, train, voitures, tout se ressemble), actions opaques, personnages comme enfermés en eux-mêmes. Animée par un respect absolu (ou presque) pour son héroïne, Garcia a opté pour une mise en scène fragmentaire traduisant à merveille son identité qui part en carafe…
de Nicole Garcia
France, 1998, 1h57