Ma saison préférée

A voir jeudi 5 novembre 2015 à 23h15 sur TV5 Monde |

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Né en 1943, originaire de ce Sud-Ouest où il a situé l’action du film qui l’a révélé en 1975 («Souvenirs d’en France»), André Téchiné appartient à la génération des cinéastes qui, tels Jean-Marie Straub, Jean Eustache, Philippe Garrel, Gérard Blain ou Jacques Doillon, ont eu fort à faire pour guérir des belles espérances engendrées par Mai 68. Certains ont tiré leur révérence de manière dramatique (Eustache), d’autres ont en réchappé en empruntant des voies artistiques radicales (Straub, Garrel, Blain). Téchiné, comme Doillon, a préféré jouer au cheval de Troie en essayant d’introduire des films retors au sein du cinéma mainstream. Doillon a tenté le coup sur un mode désinvolte et très joueur. En activité depuis 1969, Téchiné n’a pas cette sérénité.

Tout comme Truffaut à l’époque, il a cru possible de renouer avec les grands récits classiques, tout en n’abdiquant jamais l’esprit de modernité qui l’habite. Cette ambition, qui l’a obligé à se coltiner des budgets conséquents et des grandes vedettes, a souvent débouché sur des insuccès douloureux. Téchiné s’est cependant toujours remis en santé en tournant des «petits» films âpres, peu coûteux et tournés avec des acteurs peu connus, des films à la fois réalistes, romanesques et sensuels, dans lesquels on retrouvait ses thèmes les plus chers: l’homosexualité, parfois latente, l’ambiguïté, l’obsession, l’amour ou le sexe.

Avec la présence de Daniel Auteuil et Catherine Deneuve au générique, il est évident que «Ma Saison préférée» (1993) appartient à la première catégorie… Berthe (Marthe Villalonga) est victime d’un malaise. Ses deux grands enfants accourent à son chevet. Notaire œuvrant en province, Emilie (C. Deneuve) revoit ainsi son frère Antoine (D. Auteuil), neurologue réputé, après trois ans d’ignorance mutuelle. Réunis par la force du destin, la sœur et le frère renouent en évoquant leur enfance commune, s’efforçant de mettre de côté les fêlures de leurs existences respectives.

Ce drame doux-amer est divisé en quatre parties correspondant aux quatre saisons: «Le départ» (hiver), «Le faux-pas» (printemps), «Le pas suivant» (été) et «Le retour» (hiver)… En résulte sans conteste l’un des plus beaux films de Téchiné, porté par des acteurs au sommet de leur art, avec une mention à un Auteuil inquiétant d’étrangeté, et à une Deneuve qui n’hésite pas exhiber les meurtrissures de l’âge.

de André Téchiné
France, 1993, 2h05