Les Misérables (II): L’Evadé du bagne

A voir dimanche 13 décembre 2015 à 0h00 sur France 3 |

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Paru en 1862, le roman-fleuve de Victor Hugo a fait l’objet de multiples adaptations cinématographiques (plus de trente à ce jour). C’est Alice Guy, pionnière du cinématographe, qui a ouvert les feux en 1907. A sa suite, des cinéastes du monde entier ont tenté de porter à l’écran les déboires de Jean Valjean, notamment les Japonais, littéralement happés par la verve mélodramatique hugolienne, avec les versions successives de Kiyohiko Ushihara et Yoshinobu Ikeda (1923), Seikan Shia (1929), Tomu Uchida (1931), Mansaku Itami (1938) et autre Daisuke Ito (1950).

L’ouvrage a su aussi séduire des cinéastes turc, coréen, indien, égyptien, étasunien. En France, des vedettes comme Harry Baur, Jean Gabin, Lino Ventura ou Jean-Paul Belmondo ont prêté leurs traits «massifs» à l’infortuné Jean Valjean. Sans doute frappés d’ethnocentrisme, les spécialistes considèrent les adaptations du cinéaste français Raymond Bernard et de l’Italien Riccardo Freda comme les plus réussies. Il est vrai que la version de Freda est particulièrement intéressante.

Tourné une année après «L’Aigle noir», les «Misérables» (1947) de cet ennemi joyeux du réalisme (et encore plus du néo-réalisme) transcende littéralement le naturalisme parfois pesant de l’écrivain avec une inventivité stupéfiante, songeons seulement à cette suite de plans qui scandent «la fin joyeuse de la joie» de Fantine (comme l’a écrit Hugo) ou encore à ce mouvement de caméra inouï qui montre Cosette recevant la poupée «miraculeuse» sous la table, qui font de Freda l’un des plus grands cinéastes qui soit!

Il a aussi trouvé en Gino Cervi (le futur Peppone de la série des «Don Camillo») un interprète remarquable qui campe un Valjean subtil, très loin de l’interprétation «froncée des sourcils» d’Harry Baur. Avec la même retenue, Valentina Cortese joue à merveille le double rôle de Cosette et Fantine. Enfin, notons qu’un certain Marcello Mastroianni y fait aussi l’une de ses premières apparitions en révolutionnaire très secondaire.

L’adaptation du futur auteur du sublime «Beatrice Cenci» («Le Château des amants maudits», 1956) a été diffusée à sa sortie en salles en deux parties, «Chasse à l’homme» et «L’Evadé du bagne», comme c’est le cas dans le cadre de l’indispensable «Cinéma de minuit».

I MIserabili: Tempesta su Parigi
de Riccardo Freda
Italie, 1947, 1h32