Né en 1947, le réalisateur français Benoît Jacquot appartient à la génération des cinéastes apparue dans le reflux désenchanté de la Nouvelle Vague, celle des Chantal Akerman, Philippe Garrel, André Téchiné et Jacques Doillon. Après des films pessimistes qui attestent de l’impossibilité de tenir les promesses des Godard, Rivette et compagnie, le réalisateur de «La Désenchantée» (1990) et de «Sade» (2000) semble renaître à lui-même en vampirisant avec talent l’être féminin profond.
Adaptant un roman de Chantal Thomas, Jacquot nous offre par le biais de sa liseuse favorite, la jeune Sidonie Laborde (Léa Seydoux), un accès direct à Marie-Antoinette (Diane Kruger), la reine frivole et étrangère, durant ces jours de révolution au terme desquels elle sera déposée puis guillotinée. Après la prise de la Bastille, s’instaure le règne du sauve-qui-peut à la cour du château de Versailles déjà infesté de moustiques et de rats. Mue par une admiration sans bornes envers la reine, Sidonie profite de la panique générale pour tenter de se rendre indispensable. Hélas, la reine ne songe qu’à sauver la vie de la Duchesse de Polignac (Virginie Ledoyen) dont elle est passionnément éprise, jusqu’à user de sa liseuse comme d’un leurre…
De façon prodigieusement vivante, le cinéaste nous fait vivre de l’intérieur l’effondrement d’une société complètement déconnectée des réalités qui grondent au-delà des jardins de Le Nôtre, entraînant dans la catastrophe les sans-grade pris au piège de leur propre aliénation! En résulte une description impitoyable de la peur panique qui saisit les nantis, quand s’écroule sous les ors trompeurs du château de Versailles tout ce qui semblait pourtant immuable…
de Benoît Jacquot
France, 2012, 1h40
à voir à Neuchâtel