Le Concert

A voir jeudi 8 octobre 2015 à 20h50 sur France 3 |

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Acteur formé au théâtre yiddish de Bucarest, le jeune Radu Mihaileanu fuit dès 1980 la dictature de Ceaucescu. Après avoir passé par Israël, l’exilé se réfugie en France où il étudie le cinéma. Et d’y tourner son premier long-métrage en 1993, «Trahir», qui narre les déboires d’un jeune poète roumain sous le régime communiste! Cinq ans après, Mihaileanu réalise «Train de vie» dont le propos s’inspire d’un fait véridique vécu par ses parents. Ces derniers eurent la vie sauve en montant dans un faux train de déportation mis sur pied pour tromper les nazis qui, en 1941, déportaient tout azimut en Roumanie. Avec «Vis, va et deviens» (2005), l’histoire d’un enfant éthiopien adopté par une famille séfarade qui vit dans l’angoisse que l’on découvre qu’il n’est ni juif ni orphelin, le cinéaste connaît enfin la consécration.

Sorti en 2009, «Le Concert» joue sur les mêmes ressorts dramatiques, autrement dit l’usurpation d’identité et la judéité, mais dans un registre plus léger, parfois grotesque, qui évoque le Kusturica de la grande époque… Déchu en pleine gloire pour avoir refusé de licencier ses musiciens juifs, le chef d’orchestre du Théâtre Bolchoï a été rabaissé au grade de «technicien de surface». Trente ans après ces faits caractéristiques de l’époque brejnévienne, Andrei Filippov (joué par le grand acteur russe Aleksei Guskov) intercepte un téléfax du Théâtre du Châtelet qui invite l’orchestre officiel du Bolchoï à se produire sur la prestigieuse scène parisienne. La suite se laisse facilement deviner: l’ex-maestro bat le ban de ses anciennes ouailles déclassées et les convainc de reprendre leurs instruments pour aller jouer à Paris le concert pour violon et orchestre de Tchaïkovski, son œuvre fétiche. Confronté au décès de son ancienne soliste, Filippov la remplace par une jeune virtuose française égocentrique (Mélanie Laurent). La présence du véritable directeur du Bolchoï en vacances dans la capitale française va un peu compliquer la tâche de l’usurpateur. Après bien des aventures, à Moscou puis à Paris, cet ensemble de bras cassés va prendre sa revanche sur le destin et l’intolérance…

En ces temps de crise, il n’y a rien de surprenant à ce que «Le Concert» ait emporté l’adhésion, car il illustre à merveille l’adage de l’essayiste André Bazin (recyclé par Godard): «Le cinéma substitue à notre regard un monde accordé à nos désirs.» Tout est dit!

de Radu Mihaileanu
Belgique / Italie / Russie / Roumanie / France, 2009, 2h