A voir mercredi 19 août 2015 à 23h sur RTS Deux |
Bertrand Tavernier, l’homme aux multiples casquettes, s’est illustré dans de nombreux domaines cinématographiques. Critique aux Cahiers du cinéma, Positif ou encore Cinéma, il a notamment rédigé une somme captivante sur le cinéma américain («Cinquante ans de cinéma américain») dans lequel il raconte ces réalisateurs qu’il affectionne tant. En 1974, il réalise «L’Horloger de Saint-Paul», son premier long-métrage et premier succès, initiant une collaboration durable avec Philippe Noiret.
Fervent admirateur du cinéma à l’américaine, il ne se cantonne pas à un genre particulier et a ainsi exploré la comédie dramatique, le film de guerre, le thriller policier ou encore le film historique, alternant non sans virtuosité les époques et animé par la certitude que le passé est «une lumière qui peut éclairer notre présent». Dans «La Mort en direct», adapté d’un romain de David Compton, le cinéaste préfigure les déboires voyeuristes de la téléréalité… Ayant appris qu’un certain Roddy a une caméra implantée dans le cerveau, un producteur propose à ce dernier de tourner un documentaire à l’insu de Katherine Mortenhoe, une jeune femme à qui il reste quelques jours à vivre, dans l’optique de proposer une série télévisée d’un nouveau genre à son audimat.
Largement méconnu dans l’œuvre de Tavernier, «la Mort en direct» aurait été, selon ses propres mots, un «calvaire à monter». Cette fable d’anticipation interprétée par Romy Schneider et Harvey Keitel met à nu la puissance de l’image et surtout du regard, celui d’un producteur assoiffé de gloire et d’argent, celui d’un homme en proie à une immense culpabilité, celui de Katherine, complice et victime à la fois de sa souffrance, et bien sur le nôtre, celui du spectateur faussement passif. Visionnaire et éternel, ce film traverse l’épreuve du temps en donnant plus que jamais raison à son auteur sur la nécessité de jeter un regard critique sur le flot incessant d’images qui accompagne aujourd’hui notre existence.
de Bertrand Tavernier
Grande-Bretagne / Allemagne de l’Ouest / France, 1980, 2h08