La Graine et le mulet

A voir lundi 3 juin 2013 à 23h15 sur France Ô |

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Après «L’Esquive» en 2004 où il invitait Marivaux en banlieue et le splendidement dérangeant «Vénus noire» (2010), le cinéaste Abdellatif Kechiche (lequel a reçu la Palme d’or à Cannes en 2013 avec «La Vie d’Adèle») signe avec «La Graine et le mulet» une formidable tragicomédie sociale, couronnée par les Césars du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur espoir féminin décerné à Hafsia Herzi. Slimane (Habib Boufares) est la dignité incarnée. Divorcé et compagnon de la propriétaire de l’Hôtel de l’Orient, il mobilise ses deux familles pour ouvrir un restaurant. Tel le mulet du titre (un poisson capable de s’adapter à n’importe quelle mer), cet immigré de la première génération, licencié des chantiers navals du port de Sète, veut encore faire face…

L’ouverture du resto sera épique, elle tournera même au martyre pour Slimane, en quête désespérée de semoule pour son couscous royal, alors que sa fille ondule du ventre pour faire patienter les clients. Au moment de qualifier cette œuvre fleuve, les superlatifs nous manquent… Le cinéma bruissant de paroles de Kechiche évoque Renoir et Pagnol pour le plaisir du verbe, mais aussi Pialat dans sa manière de faire tomber les masques, sans oublier Vittorio de Sica, le néoréaliste qui, avec un simple vélo volé, parvenait à exprimer tout le drame de l’humanité humiliée. Ici, c’est un vélomoteur, mais l’émotion reste tout aussi vive!

de Abdellatif Kechiche
France, 2007, 2h30