A voir lundi 8 mai 2017 à 22h25 sur Arte |
Fils du grand peintre impressionniste dont il a vendu quelques toiles pour financer ses films, Jean Renoir appartient au gotha des cinéastes qui, dans les années 1930, ont fait évoluer de façon décisive le septième art. Représentant d’une classe sociale privilégiée qu’il sait être en voie de disparition inéluctable, mais dont il ne renie pas l’héritage humaniste intellectuel et culturel, Renoir est en sympathie avec les idées du parti communiste. Cette ambivalence, le réalisateur de «La Grande Illusion» la surmonte en mettant au-dessus de tout son amour des personnages.
De façon géniale, il traduit en termes cinématographiques l’adage redoutable qui énonce que «chacun a ses raisons», ce qui implique qu’un bon cinéaste doit aimer un tant soit peu tous ses personnages, même les plus salauds! Selon Renoir, c’est même la condition impérative pour échapper à la réduction fonctionnelle à l’œuvre dans la plupart des films et accéder à un véritable «réalisme intérieur», comme en témoigne «La Chienne», immense drame social adapté du roman éponyme de Georges de la Fouchardière.
Maurice Legrand mène une existence morne aux côtés d’une épouse revêche et échappe comme il peut à sa réalité en peignant. Un jour, il rencontre la belle Lulu et tombe immédiatement sous le charme. Seulement, la jeune fille fréquente l’infréquentable Dédé, qui voit en Maurice le pigeon idéal pour faire de l’argent facile. Aussi, Lulu demande à son nouvel amant de réaliser des toiles qu’elle s’empresse de vendre comme ses propres œuvres…
Tourné dans le quartier de Montmartre en prise de son directe, «La Chienne» raconte non seulement la tragique inégalité des classes, mais constitue aussi un précieux document d’archives sur le Paris des années 1930. De main de maître, Jean Renoir débusque les faux-semblants Avenue Matignon et nous livre un chef-d’œuvre absolu de l’histoire du cinéma, qui a fait l’objet du remake «La Rue rouge» de Fritz Lang en 1945.
de Jean Renoir
France, 1931, 1h40