La Chambre ardente

A voir dimanche 5 février 2017 à 0h20 sur France 3 |

«Le génie est un mot, le cinéma, c’est un rude métier que l’on acquiert». Telle était l’opinion, plutôt tranchée, de Julien Duvivier (1896-1967), un grand cinéaste oublié qui s’estimait plutôt artisan qu’artiste. Cela ne l’a pas empêché de laisser derrière lui œuvre aussi abondante (soixante-huit longs-métrages) que passionnante, dont de remarquables adaptations de Georges Simenon!

Pessimiste et tourmenté, Duvivier, proche du Front populaire, a connu son âge d’or durant les années trente, signant quelques-uns de ses films-clefs, reflets d’une période plutôt sombre de l’histoire de France, avec «Poil de Carotte» (1932), «La tête d’un homme» (1933), «Pépé le Moko» (1935), «Un Carnet de bal» (1937).

De retour de son exil aux Etats-Unis, où il a continué à tourner durant la Seconde guerre mondiale, Duvivier est pressé par la profession en pleine phase d’épuration d’enfiler le costume de cinéaste officiel, duquel il se sentira un brin gêné aux entournures. La seconde partie de sa carrière s’en est ressentie avec des films certes solides, mais fleurant bon la commande («Le Petit Monde de Don Camillo», 1952; «Voici venu le temps des assassins», 1956).

Tourné en 1962, la même année que «Le Diable et les Dix Commandements», un film à sketches basé sur le Décalogue, «La Chambre ardente» échafaude une sombre histoire d’empoisonnement qu’un inspecteur de police (Claude Piéplu) tente de démêler dans un château bavarois, coproduction avec l’Allemagne oblige! Machination machiavélique ou spiritisme mortifère, il peine à se faire son idée…

A l’époque, la critique s’en retourne plutôt mitigée du Musée Grévin où a eu lieu la première. Adapté d’un roman de John Dickson Carr par Charles Spaak, complice de longue date de Duvivier, ce mixte de fantastique et de film policier déconcerte avec son double postulat, l’un rationnel, l’autre surnaturel. Revu aujourd’hui, le film surprend par son humour décalé, sa complaisance à souligner les détails sordides et une scène de funérailles dansantes dont la bande-annonce avait exagérément fait son miel, histoire de choquer le bon peuple…

de Julien Duvivier
France, 1962, 1h50