A voir vendredi 7 mars 2014 à 02h30 sur Arte |
En fabriquant une créature de toutes pièces, se servant de restes de cadavres, le docteur Frankenstein (Kenneth Branagh) donne incontestablement vie au monstre (Robert de Niro) le plus célèbre de l’histoire des monstres. Incarnant la dérive scientifique, le savant est progressivement gagné par la folie, puni d’avoir osé se substituer à Dieu ou à la nature (selon les croyances)… En effet, la créature ne tarde pas à semer la terreur autour de lui, s’en prenant à sa famille et à ses amis, avant de le forcer à créer un monstre au féminin à son image. Ainsi, jusqu’à sa mort, Frankenstein sera victime de sa propre invention.
D’un pessimisme sans concession, le texte de Mary Shelley date de 1818. L’auteure n’a alors que 19 ans, et ignore probablement qu’elle vient de signer l’un des écrits majeurs du romantisme anglo-saxon. Si la première adaptation cinématographique date de 1910, c’est le film de James Whale de 1931 qui marque durablement l’histoire du cinéma, notamment grâce à la performance de Boris Karloff dans le rôle de la créature. Une soixantaine d’années et une trentaine d’adaptations (plus ou moins heureuses) plus tard, Kenneth Branagh, le «Wonder Boy» du cinéma anglais, s’éloigne du cinéma d’horreur à proprement parler pour restituer l’esprit romanesque de l’histoire originelle. Plutôt que s’enfuir à toutes jambes en criant au loup, l’on discute métaphysique, évolution et existence humaine dans une atmosphère feutrée typique du début du 19e siècle. Grandiloquence et démesure à l’appui, l’auteur de «Beaucoup de bruit pour rien» (1993) rend un bel hommage à l’une des histoires les plus universelles de l’Humanité. Immortalité, transition effrayante de la vie vers la mort, sentiment amoureux, ou autant de questions qui nous animent et expliquent l’impact inaltérable de «Frankenstein».
Mary Shelley’s Frankenstein
de Kenneth Branagh
Etats-Unis, 1994, 2h08