A voir mercredi 8 juillet 2015 à 22h40 sur Arte |
On ne sait pas encore vraiment pourquoi, mais, à partir des années 1990, des centaines puis des milliers de jeunes Argentins se sont mis à fréquenter les écoles de cinéma. Pablo Trapero a été l’un de ceux-là. Ce dernier a rapidement prouvé son très grand talent avec «Mondo grúa» (1999), une chronique douce-amère de l’improbable réinsertion d’un quadragénaire dans le marché du travail. Complètement différent tant sur le plan de la forme que du thème, «Nacido y criado» a ému jusqu’aux larmes le public venu le découvrir au Festival des Trois Continents à Nantes. Le septième long-métrage de Trapero dénonce l’enlisement de l’Argentine dans la criminalité en jetant un regard frontal sur les dommages collatéraux provoqués par les cartels.
Julian (Ricardo Darín) et Nicolas (formidable Jérémie Renier), deux amis prêtres, s’emploient tous deux à adoucir le quotidien éprouvant de leurs prochains. Le premier lutte corps et âme contre les politiques pour superviser la construction d’un hôpital dans le bidonville de la Vierge, un des nombreux quartiers défavorisés de la banlieue de Buenos Aires. Le second revient d’un séjour désastreux dans la forêt amazonienne, où il a assisté au massacre des indigènes par des milices paramilitaires. De moins en moins prêt à se laisser porter par sa foi, Nicolas se rapproche d’une assistante sociale athée, tandis que les travaux de l’hôpital sont subitement arrêtés par le gouvernement…
Pablo Trapero brosse le portrait sinistre d’un pays malade, aux prises avec une violence généralisée, d’où jaillissent des éclairs d’humanité représentés par un enchevêtrement de récits sur l’entraide et l’amour. Egalement irréprochable sur le plan formel, «Elefanto Blanco» est le nouveau cri de révolte assourdissant d’un cinéaste engagé qui s’est fait le porte-parole artistique d’un pays bientôt exsangue.
de Pablo Trapero
Argentine / France / Espagne, 2012, 1h45