Derrière le miroir

A voir dimanche 8 juin 2014 à 0h05 sur France 3 |

derriere-le-miroir_WEB

Incarnant non sans noblesse la figure du cinéaste maudit, Nicholas Ray (1911-1979), dont Wim Wenders filma l’agonie dans «Nick’s Movie» (1980), est surtout connu pour avoir dirigé James Dean dans «La Fureur de vivre» (1955). Bien évidemment, Ray n’est pas l’homme d’un seul film, mais sa conduite intransigeante («Je suis un étranger ici-bas», aimait-il à répéter aux pontes d’Hollywood) lui a valu de connaître un sort identique à Orson Welles (beaucoup de projets, peu de films)!

Après la Deuxième Guerre mondiale, Nicholas Ray participe avec Elia Kazan à formuler un nouveau cinéma américain. A la recherche du sens de leur existence, les personnages de ces «nouveaux» auteurs ne sont plus les individus irréprochables de l’âge d’or hollywoodien, mais des anti-héros faibles et tourmentés dont le destin s’avère presque systématiquement tragique. Parfait représentant de ce tournant cinématographique, «Derrière le miroir» raconte le chute inéluctable d’un père de famille.

Atteint d’une maladie rare et incurable, Ed Avery teste un nouveau médicament, la cortisone, dont les effets secondaires sont encore très mal connus des professionnels de la santé. Très en forme au début de son traitement, Ed ne tarde pas à devenir irascible et violent. Un jour, pris d’un accès de folie, il tente de mettre fin aux jours de son épouse et de son fils…

C’est en feuilletant le New Yorker que Nicholas Ray tombe sur un article décrivant le comportement d’un patient sous cortisone. Il propose immédiatement le projet à James Mason qui devient le producteur et l’interprète principal du film. Au-delà du drame qui s’abat sur la vie d’une famille américaine de classe moyenne, le cinéaste et ses scénaristes en profitent pour dresser le portrait à couteaux tirés de l’American Dream. Derrière le miroir exaltant de la réussite professionnelle et personnelle, Nicholas Ray aborde l’ennui, le désir de fuite, le mal être et le désamour. A cet effet, le cinéaste adopte une mise en scène extrêmement symbolique et multiplie les trouvailles visuelles. En résulte un drame social d’une extrême noirceur, exécuté de main de maître par un cinéaste à fleur de peau.

Bigger Than Life
de Nicholas Ray
Etats-Unis, 1956, 1h35