Aimer, boire et chanter

A voir lundi 23 janvier 2017 à 1h40 sur France 2 |

Disparu à l’âge de 91 ans en mars 2014, Alain Resnais réussit avec «Aimer, boire et chanter» un film distribué à titre posthume d’une légèreté déchirante, une ronde cruelle dictée par l’amour et la mort aux fausses allures de vaudeville. Pour son 20e long-métrage, le réalisateur de «La vie est un roman» (1983) a choisi de décaper à sa façon, malicieusement radicale, une pièce de l’auteur dramatique britannique Alan Ayckbourn dont il avait déjà dépoussiéré le diptyque «Smoking / No Smoking» et «Cœurs».

Dans un premier temps, Resnais avait songé à un décor de jardin dont les fleurs auraient changé à chaque scène, voire parfois d’un plan à l’autre. Découragé par son producteur effrayé par la dépense, le cinéaste a remplacé ses floralies par de grandes tentures dont les un peu passées exhalent un parfum crépusculaire. Il accentue encore cet artifice en indiquant les changements de lieu par le biais de vignettes dessinées dues au bédéaste Blutch. Comme toujours, Resnais réussit à vaincre notre réticence engendrée par cet irréalisme flagrant en lui greffant une humanité qui n’a rien d’héroïque, mais si proche de nos pauvres attentes…

Dans la campagne du Yorkshire, la vie de trois couples est bouleversée par le comportement énigmatique de leur ami George Riley. Lorsque le médecin Colin apprend par mégarde à sa femme Kathryn que les jours de Riley sont comptés, il ignore que ce dernier a été son premier amour… Pendant trois mois, du printemps à l’automne, sans jamais se montrer, ce séducteur impénitent atteint d’un cancer incurable va semer la zizanie entre trois couples qui se pensaient amis. Et le génial cinéaste de conclure à nouveau de façon étrange: dans «Les Herbes folles», c’était la réplique «Maman, est-ce que, quand je serai un chat, je pourrai manger des croquettes?» Cette fois, c’est une taupe, sans doute pour nous rappeler à notre myopie!

de Alain Resnais
France, 2014, 1h48