A voir lundi 12 mai 2014 à 23h55 sur TV5 Europe |
Unique réalisateur tchadien en exercice, seul cinéaste africain bien présent à Cannes ces dernières années, Mahamat-Saleh Haroun poursuit avec une obstination remarquable une œuvre exigeante et indispensable, dédiée au quotidien de son pays miné par l’héritage du colonialisme et une guerre civile incessante.
Ancien journaliste, il a commencé sa carrière de cinéaste en 1998 avec «Bye Bye Africa», un premier film qui relate sur le ton du docu-fiction la mort du cinéma sur le continent africain. Après la soif de justice d’un fils dans «Daratt» (2006), Haroun nous avait subjugué avec «Un Homme qui crie» (2010), Prix du Jury à Cannes, qui racontait l’histoire d’un maître-nageur dans un hôtel de luxe à N’Djaména, et «Grisgris» (2013), un film noir tourné dans les bas-fonds de la capitale tchadienne. Dans «Abouna» («Notre père», 2002), le ton désabusé de «Bye Bye Africa» a fait place à l’espérance d’un avenir prometteur, tant au niveau du cinéma que des rêves de ses compatriotes.
En véritable conteur, Mahamat-Saleh Haroun se met à hauteur d’enfant et suit Tahir et son petit frère Amine qui, un matin, ne trouvant plus leur père, se lancent des jours durant à sa recherche. Un jour, dans l’obscurité d’une salle de cinéma, ils pensent reconnaître leur père sur l’écran. Afin d’immortaliser ce souvenir, ils dérobent les bobines du film en question. En guise de punition, leur mère les envoie dans une école coranique…
A partir d’un fait de société extrêmement courant au Tchad (le départ inexpliqué du père), le cinéaste livre une métaphore profondément poétique de l’abandon et capte avec simplicité et grande force visuelle les ficelles du récit initiatique. Un joyau cinématographique qui confirme, trois ans après «Bye Bye Africa», l’immense talent de son auteur.
de Mahamat Saleh-Haroun
France / Tchad, 2002, 1h21