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Etabli à Los Angeles, le réalisateur français Quentin Dupieux persiste et signe dans une veine surréaliste très abrasive, façon Buñuel dernière période, celle du «Charme discret de la bourgeoisie» et autre «Fantôme de la liberté». Qu’il chante les vertus du botox («Steak»), narre les exactions d’un pneu psychotique («Rubber»), se gausse du désespoir délirant d’un quidam ayant perdu son chien («Wrong») ou relate les frasques de flics ripoux transportant leur came dans des rats morts («Wrong Cops»), Dupieux a le don de dérégler «ad absurdum» la banalité atroce du monde.
Dans cette œuvre aberrante, qui va contre toute raison, «Réalité» constitue un nouveau pic, à prendre ou à laisser, selon notre degré d’acceptation de l’insensé… Comme toujours, son cinquième long-métrage, procédant par associations qui tiennent plus de la logique du cauchemar que de la vraisemblance aristotélicienne, est littéralement inracontable, l’anti-pitch par excellence!
«Réalité» (attention titre railleur) narre les tentatives désespérées d’un caméraman pour concrétiser le film d’horreur qu’il porte en lui. Commis au filmage d’une émission culinaire dont l’animateur est dévoré par un eczéma imaginaire, Jason Tantra (Alain Chabat) réussit à convaincre un producteur, à la condition qu’il réalise un râle d’agonie susceptible de décrocher l’Oscar.
Sur la route sinueuse d’un récit troué de mises en abyme déroutantes, ce personnage par ailleurs souvent émouvant (une première dans la filmographie de Dupieux) va croiser moult personnages monomaniaques, caractérisés par un vide existentiel sidéral, dont Reality, la petite fille qui a vu une cassette VHS dans les entrailles du sanglier chassé par son père… De l’art de déconcerter le spectateur!
de Quentin Dupieux
France/Belgique/Etats-Unis, 2014, 1h35