Le Chemin de la liberté

A voir lundi 20 mai 2013 à 22h51 sur France Ô |

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Les historiens australiens un brin critiques ont nommé la période s’étalant de 1910 à 1970 l’«époque des générations volées». En 1911, les six Etats autonomes formant l’Australie adoptent une loi qui confère à tous les gouverneurs de province un droit de tutelle sur les enfants aborigènes âgés de moins de 16 ans. Sous le couvert de cette loi d’inspiration raciste, les autorités enlèvent alors tous les enfants métis à leurs familles pour leur inculquer de force les valeurs supérieures de la civilisation blanche et le goût du travail. Enfermés dans des centres de rééducation, les pauvres gosses subissent les pires traitements, avant d’être envoyés dans des bonne familles où ils sont traités comme de véritables esclaves domestiques…

Jadis fer de lance du «jeune cinéma australien», le cinéaste Phillip Noyce s’est extirpé de son exil (doré) hollywoodien (où il usinait des navets indignes de son talent) pour tourner «Les chemins de la liberté», d’après un scénario de Christine Olsen, adapté d’un livre témoignage écrit par l’une des victimes de cette politique immonde, la romancière aborigène Doris Pilkington Garimara… Arrachées à leurs mères par l’impavide Mr Neville (Kenneth Branagh), Molly (Everlyn Sampi), 14 ans, sa petite sœur Daisy (Tianna Sansbury), 8 ans, et leur cousine Gracie (Laura Monaghan), 10 ans, se retrouvent à des milliers de kilomètres de leur village d’origine, dans l’un de ces centres de sinistre mémoire où il leur est interdit de parler leur langue maternelle.

Profitant d’un instant d’inattention de leurs gardiens, les trois petites prennent la fuite et commencent à longer sur plus de 2400 kilomètres une barrière appelée par les Australiens «Rabbit-Proof Fence» (littéralement «clôture à lapins») sensée protéger les cultures des hordes proliférantes de ces mammifères dévastateurs – introduits par les colons de manière fort imprudente quelques décennies auparavant! À raison, les trois fuyardes ont la conviction que cette barrière les «ramènera» chez elles… Avec le concours de Christopher Doyle, chef-opérateur de Wong Kar-wai («In The Mood For Love»), Noyce restitue leur incroyable épopée avec une pudeur admirable, ce qui n’a pas empêché quelques politiciens amnésiques de hurler à la Nation outragée!

Rabbit-Proof Fence
de Phillip Noyce
Australie, 2002, 1h34